Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
Publicité
Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
7 juin 2008

CNIS

LA COMMISSION NATIONALE DES INVENTIONS DE SALARIES FONCTIONNE –T-  ELLE DE FACON SATISFAISANTE ?

par Jean-Paul MARTIN

European Patent Attorney

La CNIS fonctionne –t- elle de façon satisfaisante ?

Il est courant de lire et d’entendre une réponse affirmative, au motif que la majorité de ses propositions – décisions (20 à 25 par an) sont acceptées par les deux parties et ne donnent donc pas lieu à recours devant le Tribunal de Grande Instance.

Certes la plupart des propositions de la CNIS ne sont pas contestées devant le TGI. Mais pour autant il serait illusoire de croire que cela signifie que les deux parties sont satisfaites de ses propositions.

S’il en est ainsi c’est avant tout en raison du fait que la modicité relative des montants de rémunérations supplémentaires d’inventions accordés par rapport aux montants demandés, qui fait que les coûts de procédure élevés et les aléas d’une action judiciaire devant le TGI sont jugés par les salariés inventeurs disproportionnés au montant de rémunération supplémentaire (ou de juste prix) pouvant être escompté. De même les employeurs renoncent à contester devant le TGI des rémunérations supplémentaires  inférieures à 20 000 € même s’ils ne sont pas d’accord, car leurs frais d’avocats (sans compter le temps passé sur le dossier) dépasseront ce montant, de sorte qu’une procédure devant le TGI perd tout intérêt.

Ainsi les salariés se résignent, à contre- cœur, à la somme allouée par la CNIS bien qu’elle soit à leurs yeux généralement très insuffisante.

Inversement il arrive que l’employeur estime la rémunération supplémentaire excessive et introduise un recours devant le TGI.

Des précisions intéressantes ont été fournies sur ces points par Laurent Mulatier, secrétaire de la CNIS lors d’une Conférence à Paris (Espace Hamelin) le 11 avril 2005.

Dans 87% des cas la proposition de conciliation porte sur une invention de mission, et dans 13% des cas sur une invention hors mission attribuable.

Moyennes des rémunérations supplémentaires d’inventions de mission accordées par la CNIS de 1999 à 2004

1999 : 8000 €    (entre 6000 et 15000 €)

2000 : 10 000 € (entre 1350 et 22900 €)

2001 : 13000 € (entre 4570 et 24 280 €)

2002 : 7 500 € (entre 4000 et 22 200 €)

2003 : 15000 € (entre 2300 et 60 000 €)

2004 : 30 000 (entre 2800 et 100 000 €)

Moyennes des justes prix

1999 : 2500 €

2000 : 18000 €

2001 : 25000 €

2002 : 7500 €

2003 : 19000 €

Rapport entre les prétentions financières des inventeurs salariés et les montants accordés par la CNIS :

(Rapport entre les montants alloués et les montants demandés)

De 2001 à 2004 ce rapport a été compris entre 0,7 et 1/26.

Soit : 1/8,3   ,  1/5,3 ;  1/30 ;  1/6,2 ;  0,7 ;  1/26,3 ;  1/10 ;  1/10 ;  1/7,1 ;  1/62 ;  1/4,8 ;  1/11,3 ;  1/10,6

Dans l’affaire 2002/12 le montant demandé était de 5 260 000 €, le montant accordé a été de 200 000 € soit 1/26

Dans l’affaire 2004/12 le montant demandé était de 45000 €, le montant accordé a été de 32000 € soit un rapport de 0,7.

En gros plus le montant demandé est élevé, et plus le rapport du montant accordé à celui demandé faiblit…

Par ailleurs on se rend compte que le recours devant le TGI avec l’assistance d’un avocat spécialisé en PI (entre 10 000 et 25 000 € d’honoraires selon la complexité et les difficultés de l’affaire, mais s’il y a deux ou plusieurs co- inventeurs dans la procédure les frais sont allégés pour chacun) ne vaut guère les peines et soins d’un procès de 18 mois à 2 ans ou plus en 1ère instance si le montant en jeu espéré ne dépasse pas largement  40 000 €.

En effet même si le salarié obtient satisfaction devant le TGI, le montant accordé par le tribunal au titre de l’article 700 NCPC ne dépassera pas en général 5 à 10 000 € au maximum. Il ne compensera donc que partiellement ses frais d’avocat, qui viendront en déduction du montant de le rémunération accordée par les juges du fond.

Or la moyenne des montants alloués par la CNIS, bien qu’en progression notable d’année en année, n’était encore (voir les chiffres ci-dessus) que de 15000 € en 2003 et de 30 000 € en 2004 avec un pic de 100 000 €.

N.B.- La moyenne de 30 000 € par invention alloués par la CNIS en 2004 étant à comparer aux 30 000 € « royalement » accordés à chacun des co- inventeurs H. COUSSE et G. MOUZIN par l’arrêt de la Cour d’appel de Paris Cousse et Mouzin c/ Pierre FABRE du 24 novembre 2006 (définitif, PIBD- 844, III- 43) pour un chiffre d’affaire d’un médicament de 1,5 milliards d’euros sur les marchés internationaux et 100 millions de profits nets uniquement pour le Japon en 10 ans

----------------------------------------------------------------------------

On connaît une affaire dans laquelle en 2007 une rémunération supplémentaire de 300 000 € a été accordée, ce qui constitue le record de la CNIS à ce jour. Mais précisément l’employeur a contesté cette proposition et introduit un recours devant le TGI.

Il existe d’autres sources d’insatisfaction de la CNIS de la part des salariés inventeurs essentiellement :

  • la réunion de « conciliation » devant la CNIS ne donne lieu en fait à aucune tentative réelle de conciliation. La durée de la réunion et des débats est en général brève (1 heure environ) de sorte qu’aucune discussion approfondie n’y est possible. Les parties restent figées sur leurs positions, et la présidente seule décide rapidement « à la louche » du montant de la somme accordée, sans aucune justification (il n’existe aucun mode de calcul officiel ou officieux reconnu).

  • Les salariés ont le sentiment de n’avoir pas pu se faire entendre, et que les décisions étaient prises à l’avance, trop souvent selon eux avec un parti pris en faveur des employeurs.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité