Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
Publicité
Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
23 janvier 2009

En l'absence de loi ou de décret, la RS est fixée souverainement par les juges du fond

Arrêt du 18 décembre 2007 de la Chambre commerciale de la Cour de cassation Defrance c/ stéAVS

Qualité d’inventeur – Mode de détermination de la rémunération supplémentaire d’invention - 

Ce litige opposait un inventeur Michel DEFRANCE  à une PME de 4 ou 5 salariés, la société AVS, dont il était à la fois associé et salarié.

M. Defrance est  désigné comme inventeur d’une demande de brevet déposée en 1996 au nom de la société AVS sur un dispositif de décantation et de filtration de l’eau de lavage pour machines laveuses de caisses de vendange.

A la suite de différends l’ayant opposé à la société, l’inventeur saisit la CNIS qui propose de fixer à 22 500 euros le montant de la rémunération supplémentaire qui lui était due. AVS rejette cette proposition et saisit le TGI. La décision du TGI est l’objet d’un recours devant la cour d’appel de Paris, qui rend un arrêt en date du 23 mars 2005, fixant le montant de la rémunération supplémentaire due à 20 000 euros.

La Sté AVS se pourvoit en cassation.

Avec comme motifs :

-le salarié n’a pas satisfait aux formalités de déclaration de l’invention, 

-n’avait pas la qualité d’inventeur et

- le fait de fonder le montant de la rémunération supplémentaire sur le chiffre d’affaires de l’invention sans caractériser la mesure dans laquelle l’invention a effectivement eu un impact sur les ventes avait privé la décision de la cour d’appel de base légale au regard de l’article L. 611-7 du CPI.

La Chambre commerciale balaie ces objections en relevant :

-que la Sté AVS ne pouvait ignorer l’invention ayant fait l’objet d’une demande de brevet à son nom, dont elle vantait les mérites et qu’elle ne contestait pas avoir exploitée.

-Que les formalités prescrites par les articles L. 611-7, R.611-1 et suivants du CPI ne sont pas prévues à peine de nullité et que M . Defrance n’a pas manqué à son devoir d’information.

-Enfin la Chambre commerciale observe que « dès lors qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne fixe les modalités de la rémunération supplémentaire due à un salarié pour une invention de mission, non prévue par le contrat de travail ni par une convention collective, ni par un accord d’entreprises, c’est par une appréciation souveraine des éléments qui lui étaient produits que la cour d’appel (…) a fixé comme elle l’a fait le montant de la rémunération supplémentaire ;

que le moyen n’est pas fondé. »

Observations.

Cette décision illustre et on ne peut que le regretter, le refus persistant en 2007 dans la plupart des PME d’admettre la légitimité de la rémunération supplémentaire d’invention de salarié,  alors que celle- ci découle d’une  obligation légale instituée par la loi du 26 novembre 1990 soit 17 ans auparavant !

------------------------------------------------------------------------------------------------

Que dirait-on d’un employeur qui en 2007 se refuserait à admettre des congés payés à ses salariés, devenue une obligation légale depuis 1936 ??

Au motif – pourquoi pas – qu’imposer légalement des congés payés en faveur de leurs salariés à des entreprises et notamment des PME est une mesure  de nature à provoquer la délocalisation de leurs centres de R & D et des entreprises elles- mêmes vers des pays ne comportant pas dans leur législation cette obligation légale, comme les Etats- Unis…(la Chine aussi, l' Ouganda aussi, la Mongolie extérieure, le Malawi, le Zimbabwe, l'Irak, l'Afghanistan, le Tadjikstan !!)

Si l'on en croit certains porte- parole du MEDEF, une future loi française fixant des modalités de rémunération  d'inventions de salariés proportionnelle au chiffre d'affaire constituerait pour les chefs d'entreprise un épouvantail tel qu'elle provoquerait la délocalisation des centres de R & D et même de nombreuses entreprises, y compris PME !... 

Quelles sont les raisons réelles qui peuvent pousser des entreprises et centres de R & D à se délocaliser ? La première est un trop grand écart de salaires qui déséquilibre les conditions de concurrence et créé une concurrence déloyale ; ainsi des entreprises se délocalisaent de France en Slovaquie, en Tchéquie parce que les salaires y sont 5 fois moins élevés qu'en France.

Une autre raison liée à la précédente tient à de trop grandes disparités entre pays au plan de la protection sociale,du droit du travail, de la fiscalité (lois sur les 35 heures, congés payés, niveau des charges sociales, taux de la fiscalité sur les bénéfices des entreprises, salaire minimum légal, facilité de licencier...) qui faussent également les conditions de concurrence.

Mais si cet argument patronal était fondé, tous les centres de R & D français et allemands et de nombreuses entreprises industrielles françaises et allemandes auraient dû être délocalisés en Grande- Bretagne depuis longtemps !!

En effet dans ce pays les charges sociales patronales sont 3 fois moins élevées qu'en France, il n'existe pas de loi des 35 heures, les congés payés sont réduits au strict minimum bien au-dessous des 5 semaines et des 2 ou 3 semaines de RTT françaises, il n'y a pas de SMIC et pour couronner le tout la loi britannique n'autorise le paiement de prime d'invention aux salariés que si l'invention présente un intérêt exceptionnel ("outstanding"; V. à ce sujet le Chapitre 10 "Droit des inventions de salariés en Grande- Bretagne" du livre "Droit des Inventions de Salariés" JP Martin, Editions Litec, 3ème édition, oct. 2005). Autant dire jamais.

...Les entreprises françaises, allemandes et leurs centres de R & D se sont-ils pour autant massivement délocalisés en Grande- Bretagne comme ils auraient dû le faire selon l'argument du MEDEF ?

...Il n'en a bien évidemment  rien été car les rémunérations supplémentaires d'invention, ne touchant qu'un nombre infime de salariés et portant sur des sommes négligeables au regard des bugets R & D et globaux des enreprises,ne représentent en fait pour les chefs d'entreprises qu'un facteur parfaitement insignifiant, complètement négligeable dans cette problématique complexe.D'autant plus également que 70%des entreprises françaises ne déposent jamais de brevets.

Soyons sérieux ! Laissons ces billevesées à leurs auteurs.

  -------------------------------------------------------------------------------

Les moyens développés par la Sté AVS à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Paris n’avaient aucune chance d’être reconnus recevables :

-          Le non-respect des formalités réglementaires de déclaration d’invention par le salarié – ou par l’employeur – n’est pas un motif  valable pour refuser le paiement de toute rémunération supplémentaire d’invention

-          La qualité d’inventeur découle de la citation du salarié dans le brevet et sauf erreur grossière ou déclaration mensongère qui doit être prouvée ne peut être reniée par l’employeur.

-          Le montant de la rémunération supplémentaire d’invention de mission n’est fixé par aucune loi ni texte réglementaire ni convention collective ni accord d’entreprise, de sorte qu’il peut être déterminé « souverainement «  –en clair arbitrairement – par les juges du fond.

Ce dernier attendu montre une fois de plus l’urgence d’une réforme que l’Association des Inventeurs Salariés (AIS) et l’auteur réclament depuis des années, instituant des modalités légales de calcul de la rémunération d’invention de salarié pour le secteur privé…

Début décembre 2008 le GT/IS du CSPI a remis au Ministre de l’Economie et des Finances Christine Lagarde un Rapport préconisant diverses mesures sur ce sujet, qui pourraient faire l’objet d’un projet de loi.

Mais au 23 janvier 2009 cet Avis du CSPI reste totalement confidentiel…et est donc interdit de tout commentaire..Il est urgent d'attendre, quand la maison est en feu !

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité