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Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
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Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
18 février 2009

Portée d'une clause de renonciation à toute contestation dans une transaction salarié/employeur

Arrêt  TRUCHON c/ Société SDEP du 11 décembre 2007 de la cour d’appel de Nancy (inédit à notre connaissance)

Salarié embauché comme directeur des ventes- Absence de mission inventive – invention hors mission attribuable – Nullité d’une clause du contrat de travail de renonciation du salarié à tous ses droits sur toutes ses inventions futures –Renonciation du salarié à toute contestation future pour quelque cause que ce soit contre son employeur dans une transaction après licenciement- Différend sur l’invention non compris dans l’objet de la transaction en vertu  de l’article 2049 du Code civil – Paiement du juste prix dû au salarié.

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Cet arrêt du 11 décembre 2007 de la cour d’appel de Nancy – nous n’avons pas pu savoir s’il a été frappé d’un pourvoi en cassation - est particulièrement intéressant à plus d’un titre.

1.       Résumé des faits et procédure.

Claude Truchon est embauché le 1er janvier 1994 en qualité de directeur des ventes et co- gérant par la sté PROFANO, absorbée le 31 décembre 2002 par la Sté SDEP.

On lui fait signer un contrat de travail dont l’article 7 stipule :

« Toute amélioration ou découverte survenant à raison de l’activité qu’il exerce dans la société ou résultant de manière déterminante des expériences et des travaux de la société ou du groupe SEIFERT, et dont M. TRUCHON est d’ors (sic) et déjà l’inventeur ou sera l’inventeur pendant la durée de ses fonctions seront de plein droit l’entière propriété, sans restrictions ni réserves, de la société PROFANO, et ce peu importe que ces amélioration et découvertes soient brevetables ou non. La société PREOFANO dispose expressément du droit de déposer pour elle- même lesdites inventions. »

C. Truchon conçoit un dispositif de positionnement de tiges d’armatures dans un coffrage en bois, destiné à la réalisation d’ouvrages en béton armé. Ce dispositif appelé « Lucifer » fait l’objet d’un dépôt de brevet français en date du 15 avril 1998, puis européen, par la Sté PROFANO, citant C. Truchon comme inventeur.

Le 2 août 1999 C. Truchon est licencié et le 1er septembre 1999 les parties signent une transaction prévoyant le paiement de diverses indemnités au salarié, et qui est ainsi rédigée :

« … M. Claude TRUCHON déclare expressément accepter le règlement de la somme transactionnelle sus- mentionnée (170 000 F) moyennant quoi il considère que la société PROFANO est dégagée de toute obligation à son encontre tenant aux sommes à lui revenir (…) D’autre part M. TRUCHON renonce pour l’avenir à faire requalifier le licenciement intervenu à son encontre en une rupture irrégulière ou abusive et à exercer contre la société PROFANO toute action judiciaire de quelque nature qu’elle soit, à propos des rapports ayant pu exister entre les parties signataires en cours de travail ou après cessation. Enfin M. Truchon admet être rempli de tous ses droits légaux et conventionnels et s’oblige à ne pas réclamer, directement ou par voie de justice, toute somme complémentaire à quelque titre que ce soit (salaires, congés payés, heures supplémentaires, primes conventionnelles, accessoires de salaires, indemnités de toutes natures, frais professionnels et pour quelque motif que ce soit. »

Le 26 août 2002 C. Truchon réclame à la sté PROFANO le paiement du « juste prix » de son invention qu’il considère comme hors mission attribuable.

Le 19 septembre 2002 la Sté lui oppose un refus, d’une part sur la base de la transaction du 1er septembre 1999 en estimant que selon l’article 2052 du Code civil cette transaction a l’autorité de la chose jugée, et d’autre part sur la base de son contrat de travail qui exclut toute rétribution pour ses activités inventives.

Le salarié saisit la CNIS, qui dans sa proposition de conciliation du 30 octobre 2003, rejette les arguments de l’employeur, déclare l’invention hors mission attribuable et propose à la Sté SDEP (ex-PROFANO) de payer un juste prix de 60 000 euros à l’inventeur Truchon.

SDEP refuse cette proposition et assigne C. Truchon devant le TGI de Nancy, qui par son jugement du 4 juillet 2005, déclare invalide et inopposable au salarié l’article 7 du contrat de travail, confirme le classement de l’invention « hors mission attribuable », ne reconnaît pas l’autorité de la chose jugée à la transaction et fixe le juste prix à 45 000 euros.

Le tribunal « … s’est prononcé sur la qualification de l’invention. Il a considéré que si l’article 7 du contrat de travail a prévu l’attribution de plein droit à l’employeur des inventions réalisées par M. Truchon en cours d’exécution de son contrat de travail, cette clause ne lui confère pas pour autant une mission inventive, par ailleurs n on comprise dans les fonctions de directeur des ventes(...) Les premiers juges en ont déduit que l’invention en cause doit recevoir la qualification d’invention hors mission attribuable… ».

« S’agissant de la fin de non- recevoir tirée de la chose jugée, le tribunal a rappelé qu’aux termes de l’article 2049 du Code civil, les transactions ne règlent que les différends qui y sont compris. Après avoir analysé le contenu de l’acte, il a retenu que par l’accord du 1er septembre 1999, les parties ont exclusivement entendu mettre fin aux différends se rattachant à l’exécution et à la rupture du contrat de travail, sans envisager à aucun moment la contrepartie financière qui pouvait être due à M. Truchon en raison de l’invention « Lucifer ».Il en a déduit que la demande de M. Truchon, qui a pour objet la revendication d’un juste prix, porte sur un point non inclus dans le protocole transactionnel. Ensuite le tribunal a écarté l’application de la prescription quinquennale de l’article 2277 du Code civil, après avoir relevé que le juste prix pour une invention hors mission est une créance forfaitaire, sans nature salariale, comme telle non évaluée en fonction du temps passé, mais en tenant compte de l’utilité industrielle et commerciale de l’invention pour l’entreprise. »

En appel la sté SDEP maintenait ses arguments notamment que la transaction caractérise sans équivoque la commune intention des parties de mettre fin à tout litige né ou à naître entre elles, et ajouts que la créance invoquée par M. Truchon se rattache bien à son ancienne qualité de salarié de la sté PROFANO, si bien que les prétentions de l’intimé se heurtent à l’autorité de la chose jugée que l’article 2052 confère aux transactions.

Le salarié maintenait que le juste prix de son invention n’était pas compris dans l’objet de la transaction, de sorte que l’autorité de la chose jugée ne pouvait s’attacher à celle- ci pour son invention hors mission attribuable.

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Article 2049 du Code civil

Créé par Loi 1804-03-20 promulguée le 30 mars 1804

Les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.

Article 2052 du Code civil

Créé par Loi 1804-03-20 promulguée le 30 mars 1804

Les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort.

Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion

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La cour d’appel relève à juste raison que  selon l’article L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle lui- même «  il ne peut être dérogé aux droits qui lui sont reconnus (au salarié) par ce texte que de dans un sens qui lui est plus favorable » et que « le contrat de  travail ne peut pas restreindre les droits que tient l’inventeur salarié de l’article L. 6011-7 du Code du travail (sic : la cour mentionne par erreur le Code du travail au lieu de « de la propriété intellectuelle »).

Les juges du fond en déduisent très logiquement que l’article  7 du contrat de travail dépouillant le salarié de tous ses droits légaux sur ses inventions futures est entaché de nullité.

Par ailleurs la cour d’appel  observe que le poste de directeur des ventes ne comporte aucune mission de recherche inventive et que l’employeur « ne justifie en aucune façon  avoir demandé (au salarié) de réaliser des  études et des recherches dont l’invention en cause serait le résultat. » L’invention est donc confirmée dans son classement « hors mission attribuable ».

Analyse tout à fait correcte de la problématique de la mission inventive.

Enfin la véritable portée de la transaction est analysée et la cour d’appel expose avec  pertinence les motifs pour lesquels, contrairement à ce que soutient l’appelante SDEP, elle ne peut fonder une irrecevabilité tirée de l’autorité de la chose jugée attachée à la transaction selon l’article 2052 du Code civil.

« …Si par l’article 5 de la transaction du 1er septembre 1999, dont l’objet était de mettre fin au litige né de la contestation soulevée par M. TRUCHON sur le caractère réel et sérieux des motifs de son licenciement, l’intimé s’est engagé à n’exercer contre son employeur aucune action judiciaire,  de quelque nature qu’elle soit, il n’en demeure pas moins que les premiers juges ont rappelé ont rappelé à juste titre que selon l’article 2049 du Code civil, les transactions ne règlent que les différends qui s’y trouvent compris. Or l’examen de la transaction fait ressortir que la commune intention des parties était de régler définitivement toutes les contestations, mais seulement les contestations relatives à l’exécution et à la rupture du contrat de travail, afin d’éviter un procès prud’homal. Par conséquent la société SDEP ne saurait soutenir que par cette transaction, M. TRUCHON aurait aussi renoncé à agir devant le tribunal de grande instance pour obtenir, non pas un complément de salaire, mais une compensation exceptionnelle, instituée par la loi, et à fixer par la voie judiciaire en cas de désaccord, en contrepartie de l’exercice par la société SDEP de son droit de se faire attribuer les droits attachés, non pas à un travail effectué sous la subordination de son ancien employeur, mais à une invention faite de sa propre initiative dans le domaine des activités de l’entreprise pendant la période d’exécution de son contrat de travail. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il rejeté la fin de non- recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée attachée à la transaction. »

Enfin la cour rappelle que le juste prix d’une invention attribuable n’a pas la nature d’un salaire. Et qu’en tout état de cause « la prescription quinquennale édictée par l’article 2277 du Code civil  n’atteint les créances (salariales) que si elles sont déterminées. Or il n’en est plus ainsi lorsque leur fixation fait l’objet d’un litige entre les parties. Par conséquent c’est encore à juste titre que le tribunal a écarté la fin de non- recevoir tirée de la prescription de l’action » formulée par la Sté SDEP.

La cour confirme le jugement en toutes ses dispositions.

2.       Observations.-

Les conclusions des juges du fond relatives à l’illégalité de toutes dispositions du contrat de travail signé par le salarié moins favorables au salarié que le plancher légal obligatoire et d’ordre public de l’article L. 611- 7 du CPI sont classiques et n’appellent pas de remarque particulière.

2.1)  Illicéité du contrat de travail

De même la cour d’appel comme les juges de première instance ont pertinemment analysé la problématique de l’absence de mission inventive explicitement confiée du salarié C. Truchon, dont les fonctions de directeur des ventes étaient par ailleurs exclusives de mission inventive.

Le contrat de travail d’une part n’attribuait pas de mission de recherche inventive au salarié, mais d’autre part réservait par avance à l’employeur la propriété de toutes les inventions futures qu’il pourrait concevoir, et ce sans aucune contrepartie financière pour le salarié.

Ce qui clairement était illégal, car la loi (L. 611-7 CPI) exige de l’employeur :

-                     qu’il verse au salarié inventeur une rémunération supplémentaire pour les inventions de mission,

-                     et négocie un « juste prix » payable au salarié auteur d’une invention hors mission mais dont  l’employeur a revendiqué l’attribution.

Il faut observer qu’au vu de ce contrat de travail illicite un raisonnement similaire aurait pu être tenu par les juges du fond si l’invention avait été reconnue «  de mission » appartenant ab initio à l’employeur. En effet de façon illégale l’employeur refusait par avance toute rémunération supplémentaire au salarié pour des inventions de mission éventuelles.

2.2) Portée de la clause de « renonciation à une contestation quelconque à l’encontre de l’employeur pour quelque motif que ce soit » dans la transaction.

C’est à juste raison que successivement  la CNIS par sa proposition de conciliation du 30 octobre 2003, les premiers juges puis la cour d’appel de Nancy ont estimé à l’examen du texte de la transaction que l’objet de celle- ci et donc le montant versé n’incluaient pas le « juste prix » d’une invention attribuable, qui n’avait pas été discuté au cours de la négociation qui avait précédé la signature de la transaction. De sorte que conformément à l’article 2049 du Code civil le différend relatif à cette invention attribuable ne pouvait pas être considéré comme réglé par la transaction, qui n’avait ainsi pas l’autorité de la chose jugée pour ce nouveau différend.

Il faut souligner que cette conclusion aurait logiquement été la même si l’invention de C. TRUCHON avait été réalisée dans le cadre d’une mission inventive qui lui aurait été confiée par la Sté SDEP et donc  classée «  de mission ».

En effet comme dans le cas précédent le texte de la transaction ne contenait aucun passage permettant de soutenir que ce problème avait été discuté entre les parties avant la signature de la transaction. Ce qui était conforté par le fait que le contrat de travail excluait tout versement de rétribution supplémentaire pour des inventions de mission ou attribuables, de sorte qu’un différend né du non- versement d’une rémunération supplémentaire d’invention de mission n’aurait pas non plus été réglé par le protocole transactionnel ni compris dans l’objet de celui- ci.

2.3   ) Positions successives contradictoires de la CNIS sur la portée d'une clause transactionnelle de renonciation à toute contestation "pour quelque cause que ce soit"

Litige POISSON c/ LHOIST - TGI Paris du 9 avril 2004 (inédit)

Cette affaire Truchon c/ SDEP est à comparer avec une affaire POISSON c/ LHOIST avec laquelle elle présente de grandes similitudes, mais qui a été tranchée de façon diamétralement opposée par la CNIS le 22 décembre 2001.

Nous avons commenté ce litige POISSON dans notre ouvrage « Droit des Inventions de salariés » Editions Litec, 3ème édition, oct. 2005, page 91, § 257 (sans citer le nom des parties). Les données de ce différend étaient très voisines mais les inventions en cause étaient de mission et non attribuables : le salarié était directeur R & D et on lui avait confié en outre la gestion de la propriété industrielle de l’entreprise.

Pendant ses 10 années de présence dans l’entreprise il avait vainement demandé plusieurs fois à sa direction générale des rémunérations supplémentaires pour ses inventions brevetées. Se heurtant chaque fois à des fins de non- recevoir et à des refus de toute discussion. Après son licenciement il négocia une transaction afin d’éviter de porter le litige devant les Prud’hommes. En raison des refus répétés antérieurement signifiés par sa direction générale il n’avait pas de nouveau soulevé la question de la rémunération de ses inventions, laquelle n’avait donc pas été discutée ni évoquée durant les 3 mois de la négociation.

L’employeur exerça de fortes pressions (sur la nature desquelles il n’est pas nécessaire de fournir des précisions) pour que M. Poisson signe une transaction comportant une  clause de  renonciation à toute contestation  ultérieure contre son employeur « pour quelque motif que ce soit » et déclarant qu’il s’estimait rempli de tous ses droits, lesquels incluaient en application de son contrat de travail le versement de deux ans de salaire à titre d'indemnité de licenciement.

Sans véritable discussion la CNIS par la voix de sa présidente rejeta d’emblée la demande du salarié qu’elle déclara irrecevable. La présidente laissa au défenseur du salarié juste le temps d’exprimer son point de vue et ses arguments. Et décréta immédiatement, sans réfuter les arguments présentés, que le problème des inventions de M. Poisson et de leur rémunération supplémentaire était compris dans l’objet de la transaction et que l’indemnité reçue (2 ans de salaire) incluait les rémunérations supplémentaires d’inventions dues..

Il fut alors exposé à la CNIS que l’indemnité  transactionnelle versée était égale à deux années de salaire de l’inventeur en application de son contrat de travail qui prévoyait cette indemnité en cas de licenciement sans faute lourde. De sorte qu’arithmétiquement cette indemnité ne pouvait pas inclure  les rémunérations supplémentaires d’inventions de mission, qui auraient dû être élevées au vu de leur intérêt  commercial important, attesté par leurs chiffres d’affaires.

…Peine perdue. La présidente de la CNIS maintint  son point de vue et invoqua de plus deux motifs pour tenter de justifier l’irrecevabilité de la requête de l’inventeur :

1.                  Il avait été assisté par un avocat au cours de sa négociation avec son employeur,

2.                  Il était chargé de la gestion de la propriété industrielle dans son entreprise en plus de ses fonctions de directeur R & D

De sorte que de l’avis de la Présidente le salarié n’avait pas pu se méprendre sur la portée de la clause de renonciation à toute contestation ultérieure vis-à-vis de son ex- employeur pour quelque motif que ce soit, donc était mal venu à réclamer le paiement de rémunérations supplémentaires pour ses inventions devant la CNIS,  de sorte que sa demande était irrecevable.

La CNIS rendit  alors une décision qui n’était pas une proposition de conciliation, et rejetait la requête du salarié Poisson pour irrecevabilité sur la base des deux motifs précités.

M. Poisson introduisit un recours devant le TGI de Paris, 3ème chambre 2ème section (vice- président M. Girardet), qui par un jugement (inédit) du 9 avril 2004 confirma l’irrecevabilité sensiblement pour les mêmes motifs. Jugement définitif car le salarié renonça à faire appel.

Le tribunal évoquant l'article 2049 du Code civil indique: "L'article 2049 prévoit que l'on peut reconnaître l'intention des parties de régler les différends qui se trouvent compris dans la transaction par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.

Attendu en l'espèce que la transaction a été signée le 4 mai 2001 après trois mois de négociations entre les parties, monsieur POISSON étant assisté d'un conseil qui a retourné le projet à la société LHOIST FRANCE avec diverses corrections dont aucune ne portait sur le termes de l'article 7".(NDLR. le conseil de M. Poisson avait demandé, sans l'obtenir en raison des mesures de rétorsion brandies, la suppression de la clause de renonciation à toute contestation pour quelque cause que ce soit.)

" ...Il convient enfin d'observer que le demandeur était, de par ses fonctions, (NDLR. : responsable de la gestion du portefeuille de propriété industrielle et directeur R & D) parfaitement au fait de la législation relative aux inventions de salariés et de la nature des sommes versée à ces derniers en cas d'inventions de misison... le demandeur a, par deux fois, affirmé être rempli de ses droits nés tant de la cessation de son contrat de travail que de son exécution et pris l'engagement de renoncer à toute réclamation à ces titres."

Que l'exigence de réciprocité des concessions a donc été respectée, la société LHOIST FRANCE ayant versé une indemnité de (.... F) en contrepartie de laquelle monsieur POISSON renonçait à toute action liée à l'exécution et/ou la cessation de son contrat de travail, et de manière plus générale, à intenter toute action ou instance pour quelque cause que ce soit (...)

Attendu que dans ces conditions (...) les parties n'ont pas entendu exclure de leur accord la prévention de toute contestation future relative aux droits nés au profit du salarié pendant l'exécution de sopn contrat. Or attendu que le contrat comprenait, aux termes de l'avenant n°1, une mission inventive à la charge deu salarié, toues les inventions brevetables, faites dans les conditions (...) énoncées (étant) régies par les dispositions légales (...) que le demandeur ne pouvait donc, en raison des responsabilités qu'il avait exercées, se méprendre sur le fait que ses propres concessions s'étendaient au droit à la rémunération supplémentaire qui lui était légalement reconnu pur ces trois brevets.

Attendu que dans ces conditions la renonciation à toute action pour quelque cause que ce soit expressément visée dans la transaction signée le 4 mai 2001 comprenait nécessairement dans l'intention des parties celle de toute action au titre de la rémunération supplémentaire.

Que cette transaction emporte, en conséquence, autorité de la chose jugée entre les parties en application de l'article 2052 du Code civil."

Que monsieur POISSON sera donc déclaré irrecevable en son action."

Il faut relever le caractère éminemment critiquable de ces deux décisions: en effet elles ont donné en définitive raison à un employeur qui avait sciemment refusé toute discussion et tout paiement des rémunérations supplémentaires d’inventions, dues à un salarié inventeur en application des dispositions légales (L. 611-7 du CPI).

Soutenir comme l'a fait le TGI que la transaction emportait renonciation à la rémunération supplémentaire comme une suite nécessaire de ce qui y était exprimé était plus que contestable : en effet les négociations entre le salarié et son ex- employeur n'avaient pas inclus dans leur objet la question de sa rémunération supplémentaire d'inventions, car celle- ci avait été refusée antérieurement à plusieurs reprises par l'employeur.Elles avaient pour objectif d'éviter que les parties ne se retrouvent devant le Conseil des prud'hommes pour les questions relevant de sa compétence, dont les rémunérations supplémentaires d'inventions ne font pas partie car elles relèvent de la compétence exclusive du TGI.

Ces  rémunérations supplémentaires ne pouvaient donc pas constituer une suite nécessaire et directe selon l'article 2049 C. civil de l'objet de la transaction du 4 mai 2001.

Le jugement considère que le versement de l'indemnité de deux ans de salaire au salarié pour son licenciement serait un "cadeau" fait par l'entreprise, en contrepartie duquel il serait juste que le salarié renonce à sa rémunération supplémentaire pour les trois inventions brevetées et exploitées...Vision fausse  car cette indemnité de deux ans de salaire était due de toute façon en application de son contrat de travail dès lors que le salarié était licencié sans avoir commis de faute lourde et qu'il ait ou non été l'auteur d'inventions brevetées et exploitées. le salarié n'avait donc pas en contrepartie à renoncer à sa rémunération supplémentaire d'invention.

La Justice a justifié ainsi un refus d’appliquer la loi... De telles décisions rendent en fait un très mauvais service aux entreprises : elles contribuent à démoraliser les chercheurs de l’industrie privée et finissent par dissuader une partie d’entre eux de déposer des brevets pour protéger leurs inventions brevetables et même de révéler  des idées innovantes à leurs employeurs.

Il est remarquable qu’à moins de deux années d’intervalle la CNIS ait rendu un avis complètement opposé dans le litige TRUCHON c/ SDEP sur la portée de la clause transactionnelle de renonciation à toute contestation du salarié « pour quelque motif que ce soit », alors que dans les deux affaires  les données étaient presque identiques… Reconnaissant ainsi implicitement mais trop tard combien avait été injuste son rejet de la demande de M. POISSON.

En effet il est fréquent  que des salariés soient conseillés par un avocat après un licenciement, surtout un cadre supérieur. Ce motif n’était donc pas pertinent. De même le fait qu’il ait chargé de la gestion du portefeuille brevets : c’est une pratique courante dans les PME et filiales de grands groupes industriels dépourvues de service brevets. Elle ne confère pas en soi au salarié une compétence juridique particulière, en l’occurrence pour des problèmes de droit du travail et de droit civil étrangers à ses fonctions de directeur R & D.

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