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Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
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Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
20 mars 2009

Enquête INPI

ENQUETE DE L’OBSERVATOIRE DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE DE L'INPI ( 2008 ) SUR LA REMUNERATION DES INVENTEURS SALARIES DANS LES ENTREPRISES PRIVEES EN FRANCE

Commentaires – Témoignage d’un inventeur salarié français employé dans une entreprise allemande

Nous reproduisons partiellement ci- dessous, sous forme strictement anonyme, un courriel reçu d’un inventeur salarié licencié par son employeur français et qui est maintenant salarié d’une entreprise allemande en Allemagne. Les découvertes qu’il y fait en matière de traitement des inventions des salariés lui permettent d’intéressantes comparaisons avec les pratiques dans les entreprises françaises où il a travaillé précédemment.

Cet inventeur a eu connaissance du Rapport d’Enquête de l’Observatoire de la Propriété Intellectuelle (INPI) réalisée et diffusée fin 2008 sur la Rémunération des Inventeurs salariés dans les entreprises en France. Voir site : http://www.inpi.fr/fileadmin/mediatheque/pdf/OPI/INPI_enquête_RIS_2008.pdf

Ce Rapport qui a pour objet les pratiques dans les entreprises françaises, contient en Annexe des commentaires très négatifs du système légal et réglementaire en vigueur en Allemagne depuis la loi du 25 juillet 1957 (modifiée en dernier lieu en 2002).

·        Critiques de la loi allemande

Par ces commentaires critiques l’Observatoire de la Propriété intellectuelle de l’INPI prend donc parti officiellement « contre » la loi allemande - et de ce fait contre tout projet de réforme en France qui s’en inspirerait tant soit peu même en le simplifiant. Autrement dit l’INPI se range au point de vue du MEDEF, alors que les inventeurs salariés français (Association des Inventeurs Salariés -AIS) mettent en avant les avantages du système allemand  qui fonctionne avec succès depuis plus de 50 ans.

Système allemand qui, alors même qu’il est dépeint comme une calamité pour les entreprises allemandes par les employeurs français et maintenant aussi par l’INPI, a inspiré directement d’importantes réformes législatives et réglementaires en France en matière de propriété industrielle.

·        Apports historiques du système allemand au système français

Est-il nécessaire en effet de rappeler que :

a)                 La Commission arbitrale allemande (Schiedstelle) salariés inventeurs- employeurs et ses règles de fonctionnement ont été transposés directement en France par la loi du 13 juillet 1978 qui a ainsi créé une « commission de conciliation » jumelle de la commission arbitrale allemande, commission qui s’est ensuite en 1980 auto- baptisée « Commission Nationale des Inventions de Salariés » (CNIS) fonctionnant auprès de l’INPI.

b)                 Selon la formule de base du calcul de la rémunération supplémentaire d’invention de salarié en application des Directives ministérielles allemandes d’application de 1959, cette rémunération (« indemnité » – Vergütung) est calculée par un pourcentage du chiffre d’affaires (ou d’une redevance de licence) pondéré par un coefficient personnel de contribution de l’inventeur à la conception et à la mise au point de l’invention (appelé « facteur de participation »).

Le principe de cet intéressement proportionnel et de son mode de calcul a été adopté en France mais uniquement pour les chercheurs du secteur public par un décret du 2 octobre 1996 (valable aussi pour d’autres créations de salariés dont les logiciels). Décret modifié par le décret du 13 février 2001.

Le facteur de participation allemand est déterminé par une grille reproduite dans l’ouvrage « Droit des Inventions de salariés » J.-Paul Martin, Litec, octobre 2005, 3ème édition, page 306). Cette grille qui peut paraître assez compliquée à mettre en œuvre n’a pas été reprise en France, où un dispositif beaucoup plus simple a été adopté : le coefficient de contribution personnel de l’inventeur est égal à 1 lorsqu’il n’y a qu’un seul inventeur. Il est compris entre 0 et 1 pour chaque co- inventeur en cas de pluralité d’inventeurs et en fonction de leurs contributions respectives, le total étant égal à 1.

L’AIS préconise un mode de calcul similaire pour le secteur privé, mais moins avantageux, et non un alignement pur et simple sur le système allemand. (V. Tableaux de calcul  des RS d’inventeurs selon les deux modes de calcul et en Allemagne sur le site http://www.inventionsalarie.com rubrique « Calculs de RS »

Est-ce vraiment le rôle de l’INPI de prendre ainsi parti dans un Rapport officiel en faveur des employeurs, alors que dans cette polémique l’INPI en tant qu’Administration/service public  devrait rester neutre au service de tous les acteurs de la PI et de l’innovation ?

·        Effets positifs de la loi allemande sur les inventions de salariés pour l’innovation en Allemagne niés par le rapport de l’Observatoire de l’INPI

Selon le Rapport de l’OPI, la loi allemande sur les inventeurs salariés n’aurait que des défauts rédhibitoires et des effets nocifs pour les entreprises  allemandes !

Elle aurait donc dû en toute logique « tuer » l’innovation et les dépôts de brevets en Allemagne depuis 50 ans, et inversement la loi française peu incitative pour les salariés du secteur privé faute de texte officiel définissant un mode de calcul de la rémunération supplémentaire, aurait dû fortement doper l’innovation et les dépôts de brevets en France…

Or tout au contraire l’industrie et l’innovation allemandes, boostées par cette loi déposent 4 fois plus de brevets allemands et 3,5 fois plus de brevets européens que la France, et l’Allemagne est constamment restée depuis 50 ans championne d’Europe loin devant la France en matière d’innovation industrielle et de dépôts de brevets, nationaux et européens !

Bien évidemment nous ne pouvons qu’être en complet désaccord avec  l’opinion négative de l’OPI. (Voir nos diverses Notes argumentées sur le présent Blog dans la rubrique « Rémunération supplémentaire » et l’ouvrage « Droit des Inventions de salariés » par Jean-Paul Martin, octobre 2005, 3ème édition,  Litec – Chapitre sur le droit des IS en Allemagne).

Voir aussi les Notes en ce sens sur le site de l’AIS http://www.inventionsalarie.com/

·         la loi allemande sur les inventions de salariés ignorée par les PME allemandes ?

De plus toujours selon ce Rapport de l’Observatoire de la PI de l’INPI, la loi allemande de 1957 ne serait pas appliquée par les petites et moyennes (Mittelstand) entreprises allemandes, dont il est affirmé (page 26) qu’elles connaissent mal ou pas du tout ces obligations légales et qu’elles ne découvriraient l’existence de cette loi qu’à l’occasion d’un litige avec un inventeur…allégation que l'auteur de la présente Note avait déjà entendue de l'un de ses interlocuteurs du GT/IS du CSPI dans le courant de l'année 2008...

Toutefois l'auteur du Rapport ne cite à l'appui de cette allégation aucun document, enquête, témoignage ou publication quelconque...De sorte que celle- ci ne présente aucune crédibilité. Sa  seule "utilité" étant d'appuyer les critiques récurrentes du MEDEF contre la véritable bête noire qu'est pour lui le système allemand des inventeurs salariés. Selon une telle méthode on peut affirmer gratuitement n'importe quoi. Il est regrettable que l'Observatoire de l'INPI, organisme documentaire officiel, hypothèque ainsi son crédit pour une cause douteuse.

Ce qui sous un autre angle revient à excuser le fait que selon l’Enquête de l’Observatoire de l’INPI  (page 5 ) au moins un  tiers des entreprises françaises ne versent aucune quelconque rémunération supplémentaire d’invention à leurs salariés inventeurs en application de l’obligation légale de la loi de 1990…Il faut remarquer que parmi les 5 explications avancées à la page 5 du Rapport de l’Observatoire par celles des entreprises interrogées qui ont accepté de dire pourquoi elles n’ont pas de système de rémunération supplémentaire des inventions de salariés, aucune entreprise ne  déclare  ignorer l’existence de l’obligation légale de la loi du 26 novembre 1990 (article L. 611-7 du Code de la PI).

Il s’agit donc bien de refus délibéré d’appliquer une obligation légale qui déplaît, et ce pour l’une des 5 raisons exposées. Certains des répondants déclarent même en assumer sciemment le risque juridique, ce qui signifie qu’ils considèrent plus « rentable » de traiter les réclamations devant le Tribunal que de payer une rémunération d’invention selon l’obligation légale, et ont défini leur stratégie en conséquence.

Pour ce qui concerne l’ignorance de la loi sur les salariés inventeurs de la part des petites et moyennes entreprises du Mittelstand, nous reproduisons ci-dessous un extrait d’un article allemand de la publication Handelsblatt Unternehmen Mittelstand du 19/06/2006 accessible sur Internet : (NDLR. : il faut savoir qu’en Allemagne de nombreuses entreprises moyennes comptent 2 à 3000 salariés, ce qui n’est pas le cas en France. Ces entreprises allemandes moyennes et même « petites » de moins de 2000 salariés comportent des services juridiques, à la différence des petites entreprises familiales de quelques salariés).

<<Innovations-Spitzenreiter Deutschland

Erfinderischer Mittelstand

Kein Grund zur Sorge: Deutschland ist weiterhin Innovations-Spitzenreiter in Europa. Doch ohne den Mittelstand ginge hier nichts: Mehr als 90 Prozent der Patent-Anmeldungen beim Europäischen Patentamt kommen von kleinen Unternehmen und Einzelpersonen.>>

Selon ces informations 90% des demandes de brevets européens déposées par des titulaires allemands proviennent de petites entreprises et d’inventeurs personnes physiques. Par ailleurs plus de 90% des inventions réalisées en Allemagne sont le fait d’inventeurs salariés (V. « Employees Inventions in Germany » par Michael Trimborn, Editons Wolters Kluwer, Munich 2009, Préface).

Autrement dit selon l’Observatoire de la PI de l’INPI pour 90% des demandes de brevets européens (environ 27000 par an) déposées par des entreprises allemandes la loi sur les inventions de salariés serait complètement ignorée (ou mal appliquée) et les inventeurs ne percevraient donc aucune compensation pécuniaire telle que prévue par la loi…et, de façon étonnante, cette ignorance quasi générale de l’obligation de rémunération supplémentaire de l’inventeur allemand  - il existe en Allemagne de nombreux ouvrages publiés sur le droit des inventeurs salariés, considéré comme très important dans ce pays - ne donnerait lieu qu’à une centaine de procédures annuelles devant la commission arbitrale (chiffre officiel).

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Original Message ----- From: xxxxxxxxx> To: ……………………..

> Sent: Thursday, March 12, 2009 11:25 PM
> Subject: Inventions de salariés en France et en Allemagne
>> Bonsoir,
>>
>> Il me semble que l'INPI adopte la stratégie du noyage de poisson.
>> C'est la manière bureaucratique courante, ""passez, il n'y a rien à
>> voir.... "
>> Là où je travaille et innove, l'inventeur est concrètement
>> récompensé, j'en ai pour preuve un collègue d'origine américaine et
>> vivant depuis  20 ans en Allemagne ayant été à l'origine d'un brevet
>> générant 200 millions de ventes annuelles de produits médicaux lui
>> procurant de substantiels revenus, quoi de répréhensible ?
>>
>> Pour ce qui ce passe dans les plus petites entreprises allemandes je
>> ne peux vous répondre, faute d'expérience.
>>
>> On reconnait des droits d'auteurs aux artistes, des droits aux
>> chercheurs du public,  des dividendes ou plus values aux
>> actionnaires, des primes aux commerciaux, des Nobels aux chercheurs,
>> des stock options aux dirigeants et quasiment rien aux inventeurs
>> salariés du privé.
>> Quand on prône à tous vents l'innovation industrielle, encore
>> faudrait il que l'on s'intéresse à ceux qui la produisent dans des
>> conditions loin d'être confortables, je vous le garantie d'expérience.
>>
>> La recherche publique est indispensable à long terme, mais la
>> recherche privée l'est aussi à court ou moyen terme. Le paradoxe
>> actuel fait que personne ne s'en soucie sérieusement.
>> Il y aurait bien quelques économistes qui s'y intéresseraient, mais
>> ils ne connaissent rien du terrain, surtout ils n'interrogent pas
>> ceux qui sont sur le terrain, tout comme les politiques, seuls les
>> sociologues me paraissent aptes à cette démarche.
>>
>> L'inculture de ce qu'est la recherche, surtout privée, est
>> probablement une des raisons. Au moins les allemands ont ouvert la
>> voie, mais ça n'a pas beaucoup d'échos. J'ai l'impression que tout le
>> monde s'en moque.
>>
>> En tous cas instaurer dans les lois la reconnaissance de l'inventeur
>> ne peut être que positif quoiqu'en dise l'INPI.
>>
>> Vous comprendrez donc pourquoi j'hésite à retourner travailler en
>> France où je n'ai presque rien reçu en contre partie de mes efforts
>> et de mes apports, j'ai surtout reçu des sanctions.
>>
>> Seule " la subordination du salarié à l'employeur " semble régir, au
>> dessus de toutes autres sortes de considérations importantes, le lien
>> de l'inventeur salarié à son employeur.
>>
>> "Chat échaudé craint l'eau froide".
>>
>> A l'époque nécessaire de l'innovation et de l'information, ce type de
>> lien parait très anachronique, pour ainsi dire désuet et contre
>> productif.
>>
>> Les pays ou sociétés qui l'auront compris auront fait un pas notable.
>>
>> Mais en France, je crains que l'oblitération ce type de problème ne
>> soit insoluble. Les clivages partisans occultent les points importants.
>>
>> Salutations,
>>
>>X... Y.....

Courriel du 14/03/2009 du même salarié

Ce que l'on pourrait rajouter concernant les ingénieurs RD c'est qu'ils
sont la plupart du temps chefs de projets, c'est à dire qu'ils doivent
coordonner toutes autres sortes d'activités, qualité, industrialisation,
cost control, rédaction de documents liés aux procédures de développement, parfois
même faire les tests techniques eux mêmes... Beaucoup d'activités qui
laissent en fait peu de temps à l'innovation, calculs de conception, les
veilles technologique-brevet-marchés qui sont le cœur de la RD industrielle.

Tout ça à réaliser dans des bureaux insalubres, mon dernier employeur
trouvait très bien de mettre les ingénieurs en open space alors que lui
avait son bureau personnel bien tranquille.

Le bureau où j'étais faisait environ 25 m2, nous étions 6 à travailler
dedans et d'autres personnes d'autres services y venant pour discuter
travail où s'y détendre en parlant football, famille, bonnes blagues,
vidéos web amusantes avec le son au maximum...

Bref du bruit en permanence, réfléchir, lire ou discuter avec un
interlocuteur au téléphone devenait une tâche presque insurmontable. Des
conditions de travail dignes du tiers monde.

J'en ai parlé au médecin du travail, expliquant le stress que de telles
conditions amenaient, de même au CHSCT, mais rien n'a changé. Que voulez
vous ? L'open space c'est la mode, on ne lutte pas contre la mode.

On trouve normal qu'un avocat, un médecin puisse avoir un bureau calme,
mais pour un ingénieur RD on trouve normal qu'il doive travailler dans
des conditions infernales.
Seulement en été, quand la plupart des collègues étaient en vacances, je
pouvais travailler dans des conditions saines et avoir des bonnes idées
inventives parce que le bureau était calme, j'y étais seul et pouvait
fermer la porte quand j'avais besoin de silence pour réfléchir ou
discuter au téléphone.

Il est extraordinaire d'entendre l'ancien patron de Renault, Mr
Schweizer, président de la Halde, expliquer qu'une des différences
expliquant la réussite scolaire des enfants des classe favorisées vient
du fait qu'ils ont une chambre pour s'isoler et travailler au calme alors que les
enfants des classes défavorisées doivent étudier dans des pièces
bruyantes, cuisine, salon avec la télé allumée, chambre à plusieurs.

Je me demande sur quelle planète il vit, quand on voit que pour des
ingénieurs ayant un rôle important dans l'économie on ne reconnait même
pas le droit de conditions de travail convenables, alors qu'on commence
à reconnaitre que c'est important pour des enfants scolarisés.

Voilà où on en est en 2009. Les patrons marchent sur la tête et sur
celle de leur employés par la même occasion.

Il y a un obscurantisme ambiant invraisemblable.

Je pense qu'il faudrait mettre une bonne fois pour toutes le problème sur la table au niveau législatif.

X… Y…

Ce témoignage donne une idée de la façon dont des ingénieurs R & D, chefs de projet et auteurs d'inventions importantes, peuvent être traités dans certaines entreprises.


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