Shuji NAKAMURA, inventeur de la Blue LED en 1993, record du monde de rémunération d’une invention de salarié en 2005 avec 9 millions US $ (7 Millions €), Prix Nobel de physique 2014 (1,3 Millions €)
(Données d’après Wikipédia)
Shuji Nakamura est un professeur américain d’origine japonaise à l' Ecole d'ingénieurs , Université de Californie, Santa Barbara (UCSB).Il est l’inventeur en 1993 de la « Blue LED” , une percée majeure dans la technologie d'éclairage. Avec Isamu Akasaki et Hiroshi Amano , il est l'un des trois lauréats du prix Nobel 2014 de physique pour l'invention de diodes émettrices de lumière bleue, qui donnent lieu à d’innombrables applications industrielles et connaissent un succès fulgurant, jamais démenti depuis leur lancement industriel en 1993.
Shuji Nakamura est diplômé de l' Université de Tokushima en 1977 avec un diplôme en ingénierie électronique , et a obtenu une maîtrise dans la même discipline deux ans plus tard, après qu'il a rejoint la société Nichia , une petite entreprise, également basée à Tokushima . C'est en travaillant pour Nichia que Nakamura a inventé la première diode à haute luminosité au nitrure de gallium. (GaN), clé de l'éclairage par LED blanche, qui est entré en production industrielle en 1993.
Non sans mal puisque Nichia, sans doute particulièrement avare de ses dépenses en matière de recherches, avait au bout d'un certainj temps sommé NAKAMURA d'interrompre les siennes sur le Blue LED parce qu'elle estimait - déjà ! - qu'elles coûtaient trop cher et ne rapportaient rien...
À l'époque, nombre de chercheurs électroniciens considéraient comme trop difficile la création d'une LED au nitrure de gallium, jugée "mission impossible". Nakamura a eu la chance que le fondateur de Nichia, Nobuo Ogawa (1912-2002) ait d'abord été prêt à soutenir son projet, qu’il parvint après de longues recherches à mener à bien en 1993... Il quitte l’entreprise en 1999 après que l'avare NICHIA lui ait royalement versé une prime de …180 US $ ( !!!) en rémunération de son invention géniale qui a permis un développement vertigineux de l’entreprise, de son chiffre d’affaires, de ses profits, colossaux, et de ses effectifs salariés
[NB. – A l’intention des dirigeants de la France à l’économie en perdition qui depuis 20 ans pataugent misérablement faute de compétence pour créer des emplois industriels: une invention industriellement exploitée génère des profits et créé des emplois !....parfois des milliers d'emplois, et ce sur le sol hexagonal, pas au Sinkiang, pas au Lesotho, au Monomotapa où on fait travailler des enfants de 5 ans pour 1 euro par jour !
Mais pour cela - ce que nos Gouvernements bornés, incompétents, aveugles et sourds ne veulent pas comprendre - il faut encourager, inciter directement LES INVENTEURS SALARIES PERSONNES PHYSIQUES, PAS LES ACTIONNAIRES/DIRIGEANTS EN LEUR VERSANT DES MILLIARDS d'Euros au titre du CIR, du CICE etc... car eux n'inventent jamais rien !
C'est ce que font avec succès depuis 60 ans l'ALLEMAGNE, le JAPON, la CHINE depuis 2010, la COREE du SUD,les ETATS-UNIS ( bien qu'ils n'aient pas de loi fédérale sur ce sujet)...Et c'est ce qui existe en France depuis 1993 mais uniquement pour le secteur public, pour la recherche académique... Pas dans le secteur privé...Deux poids deux mesures...pourquoi ?]
En 1999, Shuji MAKAMURA, mortifié par l’absence de reconnaissance de ses mérites inventifs par son employeur NICHIA, s’exile aux Etats-Unis et devient professeur d'ingénierie à l'Université de Californie, Santa Barbara.
En 2001, poussé par ses nouveaux collègues américains chercheurs qui ne comprennent pas que NICHIA ait refusé de lui payer la rémunération supplémentaire d’invention « raisonnable » qui lui était due selon la loi japonaise, Nakamura attrait en justice devant la District Court de Tokyo son ancien employeur Nichia pour sa rémunération d’invention.
A l'origine NICHIA faisant preuve d’un total cynisme et d’une avarice remarquable, avait offert à son génial inventeur salarié NAKAMURA une misérable aumône de ¥ 20,000 (environ. $ US 180 ) révélant le mépris dans lequel elle le tenait pour ses inestimables mérites ! … Alors que l’invention avait connu un succès commercial absolument fantastique et que son exploitation commerciale représentait en 2000 plus de 60% du chiffre d’affaires total de NichiaNakamura, dont parallèlement l’effectif salarié s’était considérablement accru.
Ainsi, en 7 ans l’exploitation commerciale de l’invention de la Blue LED brevetée par Nakamura était passé de 0% du chiffre d’affaires de NICHIA à plus de 60% dudit CA !
En 2004 Nakamura se voit accorder par la District Court de Tokyo la rémunération supplémentaire d’invention phénoménale de 190 millions de US $ ! Ce qui provoque un véritable tollé dans les milieux industriels du monde entier, pris de panique jusqu’en France dans les medias économiques stupéfaits et dans les milieux patronaux (MEDEF, CGPME) tétanisés, au bord de l’infarctus……
Comme il fallait s’y attendre, Nichia fait appel de la sentence ; mais la cour d’appel de Tokyo les incite à négocier une transaction. Les parties commencent à discuter, et finissent par se mettre d’accord en janvier 2005 sur le montant de ¥ 840 000 000 (~ 9 millions de dollars) soit 21,1 fois moins que ce que la juridiction de 1ère instance avait accordé à Shuji NAKAMURA…(*)
Néanmoins, 9 millions de US $ (7 millions €) représentent le plus gros bonus d’invention jamais payé par une entreprise japonaise et même dans le monde à cette date (2005) à un inventeur salarié.
Nakamura détient plus de 100 brevets.
- 2001 décerné Prix Asahi du journal japonais, Asahi Shimbun
- 2002 reçu le Médaille Benjamin Franklin en physique de l' Institut Franklin .
- 2006 Millennium Technology Prize
- Candidat 2007 pour le Prix de l'inventeur européen décerné par l' Office européen des brevets [ 10 ]
- ₩ 2008 le Prix Prince des Asturies pour recherche scientifique et technique . [ 11 ]
- 2008 doctorat honorifique en génie de l' Université de Hong Kong de la Science et de la Technologie .
- 2009 prix Harvey [ 12 ] de la Technion en Israël.
- 2012 Silicon Valley Intellectual Property Law Association (SVIPLA) Inventeur de l'année. [ 13 ]
- 2014 prix Nobel de physique (1,3 millions €) en compagnie du professeur Isamu Akasaki et du professeur Hiroshi Amano
ANNEXE I
(*) Ci-dessous notre article de début 2005 dans la Revue du Droit de la Propriété Intellectuelle RDPI de Me Yves MARCELLIN sur l’épisode judiciaire de 2004/2005 ayant opposé Shuji NAKAMURA à NICHIA Corporation son ex- employeur.
Nous y avions précisé que la qualité et l’importance colossale de son invention étaient telles "qu’elle pouvait justifier l’octroi du Prix NOBEL à son auteur NAKAMURA"… Ce qui s’est donc réalisé 10 ans plus tard…
REMUNERATION DES INVENTEURS SALARIES AU JAPON
A) L’affaire NICHIA/ NAKAMURA (2004/2005)
La retentissante affaire NICHIA c/ NAKAMURA en 2004 et 2005 avait défrayé la chronique internationale jusqu’en Europe (V. nos Notes sur ce litige dans le présent Blog).
Depuis, la pratique jurisprudentielle japonaise s’est infléchie en matière de fixation du montant de la rémunération « raisonnable » de l’inventeur salarié en application de l’article 35 de la loi, modifié en 2004 et entré en vigueur en avril 2005.
Rappelons que le chercheur Shuji NAKAMURA, salarié d’une petite entreprise NICHIA, est l’inventeur en 1990 de la BLUE LED, diode émettrice de lumière bleue, que l’on cherchait vainement à mettre au point partout dans le monde depuis 20 ans.
Le succès commercial de cette invention fut colossal et planétaire, au point qu’au bout de 10 ans sa commercialisation représentait 60% des ventes et du chiffre d’affaires total de NICHIA.
Pour toute récompense l’inventeur reçut de NICHIA une ridicule et méprisante prime de…180 dollars !
Depuis les USA où il avait pris sa retraite et poursuivait une brillante carrière de professeur d’engineering à l’Université californienne de Santa Barbara, Nakamura se rebelle et intente un procès à ses ex-employeurs.
Le 30 janvier 2004 la District Court de Tokyo lui reconnaît un droit à rémunération sur 50% des ventes de NICHIA sur le marché japonais- à l’exclusion des ventes l’étranger. Excluant ainsi de l’assiette de la rémunération « raisonnable » du chercheur la majeure partie du chiffre d’affaires réalisé sur son invention, ce qui n’a jamais été relevé dans les commentaires scandalisés publiés un peu partout y compris en France,.
Les juges appliquent à ces 50% un taux de redevances de 10 à 7% calculées sur la durée de vie totale du brevet, représentant la rémunération due à Nakamura.
Le tribunal parvient ainsi à 20 milliards de yens soit 190 millions de dollars US.
Bien évidemment NICHIA fait appel, en expliquant avec le plus grand sérieux apparent (...) que ces 190 millions de dollars vont mettre, ni plus ni moins en danger toute sa recherche et son développement futurs…(alors que NICHIA avait engrangé des milliards de dollars de profits !) Certains de ses arguments peuvent être consultés à l’adresse Internet www.nichia.com/about_nichia/pdf/jp_opinion.pdf+japan+patent+law
Ainsi que sur www.nichia.co.jp/ dans un mémoire du 29 novembre 2004 intitulé « Nichia Corporation’s Stance Regarding Article 35 of Japan’s Patent Law ».
Le 14 janvier 2005 le litige est définitivement réglé par une transaction, qui fixe le montant de la rémunération de Nakamura à 844 millions de yens soit 8 millions de dollars (ou 9 M$ selon le cours appliqué), intérêts compris, soit 4% seulement de la rémunération allouée par la juridiction de première instance.
On est loin des US $ 190 millions de NICHIA en janvier 2004 qui avaient littéralement affolé les milieux industriels japonais, américains et européens.
a) Argumentaire de NICHIA (résumé)
Cet argumentaire a une portée très générale, car il est en fait valable bien au-delà de ce cas d’espèce.
Dans son mémoire NICHIA insiste sur les risques d‘échec encourus par l’employeur lorsqu’il lance un nouveau programme de recherche. Ces risques sont d’autant plus élevés que le programme de recherche est plus innovant.
Et ces risques sont supportés exclusivement par l’employeur, pas par le salarié chercheur. Autrement dit, si le programme de recherche se solde par un échec, ce qui n’est pas rare, les investissements engagés sont perdus pour l’employeur, alors que l’employé n’en subit aucune conséquence.
Par ailleurs pour un programme de recherche l’entreprise doit généralement engager des investissements en outillage, matériels, le cas échéant embaucher du personnel etc…
Puis s’il aboutit, l’entreprise doit investir de nouvelles dépenses dans la commercialisation (marketing, frais commerciaux, publicitaires…), dont le poids relatif par rapport à l’invention brevetée augmente dans le temps pour conditionner le succès commercial final du nouveau produit, alors que parallèlement l’importance relative de la contribution de l’inventeur décroît.
Par ailleurs les risques sont multiples :
- le brevet protégeant le nouveau produit peut voir sa validité attaquée par des concurrents. S’il est annulé, les investissements engagés seront perdus avant d’avoir été amortis.
- Le brevet peut être contrefait, ce qui entraîne des pertes de parts de marché et exige des actions adéquates pour tenter de neutraliser les contrefacteurs,
- la commercialisation du nouveau produit breveté peut être considérée comme contrefaisante de brevets antérieurs par des concurrents, ce qui peut entraîner des procès.
- Le nouveau produit breveté peut être rendu obsolète prématurément par d’autres produits plus performants des concurrents.
Dans le cas particulier, NICHIA faisait ainsi valoir que des diodes plus performantes que sa BLUE LED brevetée car beaucoup plus brillantes, seraient apparues dès 1995, puis en 2004. (Notons que 2004 est l’année de la décision de 1ère instance, rendue en janvier 2004 ; l’apparition sur le marché de ce produit concurrent n’ pu avoir d’incidence que sur les ventes futures.)
De plus NICHIA avait consenti des licences croisées à deux concurrents à partir de 2002 sur son brevet de BLUE LED, et ne bénéficiait donc plus d’une exclusivité mondiale sur le produit.
Il faut croire que ces arguments ont porté sur la High District Court de Tokyo.
b) Opinion de la High Court de Tokyo
Dans son Opinion, qui a certainement conduit Nakamura à accepter la transaction bien qu’elle fût beaucoup moins avantageuse pour lui que la décision de première instance, la High Court se prononce ainsi :
L’article 35 de la loi japonaise doit être appliqué de façon à rechercher un équilibre entre deux impératifs :
a) fournir une incitation suffisante aux salariés auteurs d’inventions
b) et en même temps permettre aux entreprises de surmonter de sévères conditions économiques dans le cadre de la compétition internationale, et de se développer.
En effet l’employeur supporte seul les risques et aléas liés à l’innovation et au lancement de programmes de recherches. En cas d’échec le chercheur salarié ne partage pas ces risques et les pertes éventuelles.
Le principe est « High risk, high return ; no risk, low return ».
La rémunération raisonnable de l’inventeur salarié est d’une autre nature que le montant des profits que retirent des entreprises de l’exploitation commerciale d’une invention.
Conclusion
On voit donc que la High Court de Tokyo a ainsi largement repris à son compte les arguments de NICHIA, elle- même reprenant ceux développés par l’industrie japonaise, tétanisée par les 190 millions de dollars accordés à Nakamura…(lesquels ainsi que nous l’avons établi dans notre étude sur le présent blog, ne représentaient en fait qu’un modeste pourcentage des énormes profits accumulés en 11 ans par NICHIA, nonobstant les produits concurrents invoqués par cette entreprise).
Toutes ces considérations sont certes pertinentes. Elles tendent à faire admettre par les juges du fond que les prétentions des inventeurs seraient excessives et que les juges doivent être plus « réalistes ».
Pourtant il n’en reste pas moins évident que sans l’activité inventive des chercheurs, et bien souvent sans leur persévérance pour vaincre préjugés et obstacles de toutes sortes, notamment au sein de leur propre hiérarchie qui fréquemment ne croit pas à l’invention proposée, de nombreuses inventions ne verraient jamais le jour.
Cela a été le cas pour Nakamura auquel en 1992 sa hiérarchie chez NICHIA avait intimé l’ordre d’arrêter ses recherches car elle était inquiète de leur coût et de leur durée sans résultat industriellement exploitable …Alors qu’en 1993 intervenait la percée technologique.
Cela a aussi été le cas pour l’inventeur Jean-Pierre RAYNAUD (CA Paris du 17 décembre 1997 RAYNAUD c/ HOECHST ROUSSEL UCLAF, 4 Millions de Fr de rémunération supplémentaire d’invention) auteur d’un procédé breveté de traitement thérapeutique du cancer de la prostate évitant la castration chirurgicale, qui avait dû combattre l’hostilité de sa hiérarchie à ses recherches…
Dès lors les contributions matérielles et financières des employeurs invoquées plus haut, en aval des idées innovantes des chercheurs – moyens matériels, personnel, crédits, marketing, publicités… resteraient complètement inutiles sans en amont l’initiative et la persévérance créatrice des inventeurs.
Car le facteur déclencheur réside bien dans l’activité des, et non dans celle en aval des services production, marketing, publicité etc… Si les chercheurs ne trouvent et n’inventent rien, ce ne sont pas les services de fabrication et de marketing qui le feront à leur place !
Constat qui relativise considérablement l’argumentaire des employeurs.
En outre même dans le cas des plus hautes rémunérations accordées en France et au Japon l’essentiel des profits, et de très loin reste acquis à l’employeur.
Il est du reste révélateur que les rémunérations supplémentaires versées aux inventeurs du secteur public en France soient proportionnelles aux revenus générés par l’exploitation des inventions et puissent parfois atteindre des montants colossaux (par exemple près de 11 millions d’euros par an dans le cas du Dr POTIER (décédé en 2006) chercheur du CNRS à Gif-sur-Yvette et inventeur de molécules anticancéreuses ;
sans provoquer la moindre protestation ni le moindre commentaire de la part des entreprises (Medef, CGPME) et sans pour autant obérer la capacité de réaliser des profits et de se développer des centres de recherches publics français.
Tout au contraire le CNRS souligne désormais la contribution de plus en plus importante de ses inventeurs à son développement, et ce grâce – et non malgré ! - à leur régime légal d’intéressement à l’exploitation de leurs inventions mis en place depuis 1996.(NB. Ce nouveau régime des décrets de 1996 et 2001 est largement dû à l’action décisive du Dr Potier au ministère de la recherche).
Ce qui confirme a posteriori le bien- fondé des positions que l’auteur a développées sur ce sujet depuis 20 ans.
Jean-Paul Martin
Le 29 novembre 2007
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ANNEXE B
02 juin 2007
Ci-dessous article paru sur le présent Blog en avril 2006.
13 avril 2006
Rémunération d'invention record au Japon
Article |
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Rémunération record d'invention de salarié au Japon : huit millions de dollars Un litige entre l'inventeur NAKAMURA de la diode émettrice de lumière bleue « blue LED » et son ex- employeur NICHIA a défrayé la chronique en janvier 2004 avec une décision du 30 janvier 2004 du tribunal de Tokyo accordant une rémunération supplémentaire de 190 millions $. Ce litige vient d'être définitivement réglé par une transaction amiable conclue entre les deux parties en date du 11 janvier 2005 et dont les medias japonais et américains ont rendu compte (Japan to- day » 19/01/2005, « The Star on line » 12/01/2005, International Herald Tribune 12/01/2005). Nous avons exposé cette affaire NAKAMURA c/ NICHIA dans notre étude « Inventions de salariés au Japon « stupeur et tremblements » dans l'Empire du Soleil levant » wipla. com 12 août 2004, RDPI juillet 2004 pp 19-34) après la décision de première instance de janvier 2004. La transaction finale fixe à 8 millions de dollars (840 millions de yens, 7,3 millions d'Euros) la rémunération « raisonnable » de l'inventeur NAKAMURA, montant qui constitue à ce jour le record mondial pour un inventeur salarié. L'inventeur Sheiji NAKAMURA, qui depuis 1999 est professeur à l'Université californienne de Santa Barbara, est apparu dans de nombreux medias nippons y compris la télévision et fait en quelque sorte maintenant figure de héros aux yeux du public japonais... Avec l'inventeur TANAKA qui par son action en justice contre son ex- employeur OLYMPUS déclenchée en 2000 (ou 1999) a été à l'origine de l'arrêt du 22 avril 2003 de la Cour Suprême de TOKYO lequel a entraîné la révision fin 2003 - début 2004 de l'article 35 de la loi japonaise, NAKAMURA incarne le salarié isolé qui a osé affronter en justice une puissante entreprise ex-employeur pour faire reconnaître ses droits. Au Japon cette attitude était jusqu'à ces toutes dernières années considérée comme sacrilège et indigne. NAKAMURA et TANAKA ont fait des émules puisque depuis 1999/ 2000 de nombreux procès ont été introduits contre leurs ex- employeurs par des salariés auteurs d'inventions, qui leur réclament des dizaines de millions de dollars. La façon dont ce retentissant litige se règle finalement et le montant de la rémunération « raisonnable » versée à l'inventeur méritent quelques commentaires. 1) Transaction dévoilée publiquement au JAPON ; action de la cour d'appel en faveur d'une transaction entre les parties NAKAMURA a introduit courant 2002 une procédure devant la Tokyo District Court, pour laquelle la décision a été rendue le 30 janvier 2004, soit en moins de deux ans. NICHIA a interjeté appel devant la Tokyo High Court, laquelle a dans un bref délai examiné le dossier et d'après les médias précités a émis certaines appréciations et fait pression pour que les parties règlent leur litige par un accord amiable. Cette façon de procéder est tout à fait originale par rapport à celle des juridictions judiciaires de l'Hexagone, dans lequel une démarche quelconque d'une cour d'appel (ou d'un tribunal) appelant les parties à négocier une transaction amiable au lieu de poursuivre la procédure jusqu'à la décision judiciaire est totalement inconnue !.. De même en France les transactions amiables soldant des litiges de cette nature portés en justice sont vouées au culte du secret et par principe considérées comme rigoureusement confidentielles. Elles ne sont donc pas portées à la connaissance des tiers, a fortiori leur montant, et il est de règle qu'aucune mention ne doit en être faite dans une publication quelconque, sous peine d'être accusé d'avoir violé le secret professionnel. Cela est encore plus vérifié pour le montant de la transaction lui- même, qui est protégé par un secret absolu. Grâce à la célérité des juridictions japonaises et à l'initiative de la cour d'appel de Tokyo, ce litige particulièrement complexe a pu être réglé en moins de 3 années. 2) Importance sociale du litige NICHIA dans le cadre de la politique japonaise La cour d'appel de TOKYO a poussé les parties vers une transaction afin d'éviter une longue bataille juridique. La transaction a été acceptée par NICHIA « pour éviter d'avoir à traîner un tel fardeau ». Si NICHIA est apparemment très satisfaite de l'issue de ce litige, ainsi que les milieux industriels japonais qui poussent « un soupir de soulagement », il n'en est pas de même du professeur NAKAMURA. Celui-ci n'a pas dissimulé son mécontentement et d'après les médias précités ne l'a finalement acceptée que sur recommandation de son avocat, qui craignait qu'une décision finale de la cour ne lui soit pas davantage favorable. Quoiqu'il en soit, le montant de 8 millions $ (608 millions de Yens + 230 millions de yens pour paiement différé) est un record absolu dans les annales mondiales des rétributions d'inventeurs salariés (elle est 11 fois plus élevée que celle attribuée en France en 1997 par la cour d'appel de Paris à l'inventeur JP RAYNAUD dans son litige l'opposant à HOECHST MARION ROUSSEL). Au Japon cette affaire est considérée comme un évènement social majeur dans le cadre de la politique du premier ministre nippon visant à faire du Japon «une nation basée sur la propriété intellectuelle» (voir sur ce point notre étude précitée dans la RDPI de juillet 2004). 3) Bases de la transaction Les diodes émettrices de lumière verte et de lumière rouge ont été inventées il y a une vingtaine d'années. Par contre la mise au point d'une diode émettrice de lumière bleue était considérée comme nettement plus difficile. Elle a été mise sur le marché en 1993 grâce à l'invention de NAKAMURA. Cette « blue LED » a reçu un grand nombre d'applications en informatique, téléphonie etc... et sa réalisation par NAKAMURA est reconnue comme répondant aux critères d'attribution des Prix NOBEL. Pour cette invention majeure, qui a permis à NICHIA de réaliser des profits colossaux au point d'assurer en 2001 60% de la totalité de ses ventes, Sheiji NAKAMURA reçut la prime standard royale de ... 190 $. En 2002 NAKAMURA intenta une procédure devant le Tribunal de TOKYO, lequel dans sa décision du 30 janvier 2004 estima les profits de NICHIA, sur la période 1994 à 2010 (fin de la durée de vie des brevets) à 2,22 milliards $ (1200 milliards de yens). La participation de Nakamura à l'invention fut évaluée à 50% car NICHIA était en 1993 une petite société dépourvue de moyens importants en R & D, et la conception ainsi que la réalisation de l'invention ont été reconnues comme dues essentiellement à l'action personnelle de NAKAMURA. Le tribunal estima que 50% des ventes de Nichia (600 milliards de yens) auraient pu être réalisées via des licences du brevet sur la blue LED, avec des redevances nettes de 20% soit 120 milliards de yens (1,11 milliards $) . Un pourcentage de 17% de ces royalties, soit 190 millions $ fut attribué à Nakamura comme rémunération « raisonnable ». D'après les médias précités la cour d'appel de Tokyo réduisit drastiquement mais sans les préciser, les bénéfices estimés de Nichia en raison d'une possible contribution de 159 autres brevets de Nakamura. Enfin la contribution de Nakamura à l'invention et à son succès fut ramenée de 50% à 5%, et l'addition de ces deux reculs fit passer sa rétribution de 190 millions $ à 8 millions $. 4) Conclusion Trois aspects de cette affaire sont déconcertants : o L'énorme différence d'estimation des profits de NICHIA dus à l'invention NAKAMURA entre la décision de première instance et celle - non précisée - de la cour d'appel. o Le fait d'avoir, sans justification apparente (d'après les médias précités) réduit la contribution estimée de NAKAMURA de 50% à 5%. o Le montant dérisoire de la prime accordée initialement à l'inventeur. En effet les estimations de la cour d'appel, qui ont servi de base à l'accord amiable accepté par les deux parties, n'ont pas été justifiées. Cette absence de justifications permet de douter de la capacité des juges d'évaluer de façon pertinente le montant des profits effectivement dus aux inventions et celui des rémunérations destinées aux inventeurs. L'absence de justification par les juges japonais des valeurs retenues pour des facteurs-clés essentiels permet de suspecter d'arbitraires les valeurs retenues. C'est la raison principale semble-t-il pour laquelle des critiques ont été dans le passé élevées à l'encontre de nombreuses décisions judiciaires japonaises. Ces insuffisances, sources en elles-mêmes de contentieux, ne sont donc pas près de disparaître. Le nouvel article 35 de la loi japonaise, joint en annexe, entre en vigueur le 1er avril 2005. Afin de conformer la loi à l'arrêt OLYMPUS du 22 avril 2003, Il instaure une obligation de négociation entre le salarié inventeur et l'employeur, lequel devra pouvoir justifier que le salarié a eu la possibilité de faire entendre et prendre en considération ses arguments en vue de la détermination de la « rémunération raisonnable ».. Mais la mise en pratique de ces prescriptions soulève de nombreuses difficultés, notamment du fait du très grand nombre de dépôts de brevets au Japon et donc des inventeurs concernés. Il semble que l'on se dirige vers des procédures plus ou moins groupées, sauf pour les inventions les plus importantes, qui nécessiteront des négociations réellement individuelles. En tout cas si ces éléments sont établis et s'il n'existe pas une disproportion flagrante entre la prime versée à l'inventeur et les profits réalisés grâce à l'invention (notion de rémunération « raisonnable » qui malgré tout demeure floue), il est escompté que les tribunaux japonais devraient donner à l'avenir davantage de poids aux accords conclus entre employés inventeurs et employeurs. En tout état de cause une rétribution définitive de 8 millions $pour un seul inventeur est de nature à pousser les grandes entreprises japonaises, et par ricochet les multinationales étrangères et groupes industriels y compris français ayant des filiales au Japon, à réviser sérieusement leur politique d'incitation des salariés inventeurs, si elles désirent contrebalancer l'attraction croissante probable des compagnies japonaises sur leurs meilleurs chercheurs. Le 25 janvier 2005 Jean-Paul Martin Annexe : nouvel article 35 de la loi japonaise "4. Where a contract, employment regulation or any other stipulation provides for the remuneration provided in the preceding paragraph, the payment of remuneration in accordance with the said provisions shall not be what is recognized unreasonable in light of situations including where a consultation between the employers and the employees had taken place in order to set standards for the determination of the said remuneration, where the set standards had been disclosed, and where the opinions of the employees on the calculation of the amount of the remuneration had been heard. 5. Where no provision setting forth the remuneration as provided in the preceding paragraph exists, or where under the preceding paragraph the payment of the remuneration in accordance with the provisions is recognized unreasonable, the amount of the remuneration under paragraph 3 shall be determined in light of the profit to be received by the employers from the invention, burden borne by the employers, contribution made by the employers and benefit received by the employees in relation to the invention and any other factors." |
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