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Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
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Inventions de salariés et de dirigeants sociaux, procédure civile
12 novembre 2017

CA Paris du 30 mai 2017 WILSON c/ SKF : enfin une appréciation correcte en droit de la prescription par la cour d'appel de Paris

 Observations relatives à CA Paris  WILSON c/ Sté SKF du 30 mai 2017

 

I.- ) Le jugement de 1ère instance rendu par le TGI de Paris  a été publié sur le présent blog et a fait de la part de l’auteur des présentes observations l’objet d’un commentaire publié le 18 décembre 2016 à l’adresse suivante :

http://jeanpaulmartin.canalblog.com/archives/2016/12/18/34703733.html

 

Le TGI avait rejeté toutes les demandes de l’inventeur WILSON en estimant que les primes d’invention et de dépôt de brevet déjà versées à l’inventeur avant son assignation satisfaisaient aux 4 critères d’évaluation énumérés par la CC Nationale des Industries chimiques de 1985 – et non par la CC de La Métallurgie dont relève la sté SKF .

…Primes  faibles « d’invention » et de « dépôt de brevet » inférieures au total de 2000 euros. Et sans rapport avec l’exploitation industrielle/commerciale et donc avec l’intérêt économique de l’invention, qui  ne fait pas partie des éléments de calcul des dites primes.

 L'arrêt CA Paris du 30 mai 2017 est publié in extenso sur le présent blog à l'adresse :

http://www.canalblog.com/cf/my/?nav=blog.manage&bid=98954&pid=35462897

Ci- dessous à la fin des présents commentaires nous reproduisons n en Annexe nos observations de ce jugement, publiées le 18 décembre 2016 sur ce blog.

Dans ceux- ci nous avons sévèrement critiqué cette décision complètement fantaisiste, émanant de juges manifestement  béotiens en droit des brevets d’invention et dépourvus de sens des réalités.

 La Cour d’appel de Paris infirme  le jugement  scandaleux du TGI (cf. nos commentaires du 18/12/2016) , pointe les lacunes du Règlement d’inventions de SKF en regard des exigences légales et finalement ne le prend pas en considération,. En définitive la cour d’appel retoque les montants des rémunérations supplémentaires d’inventions par fixation judiciaire..

« Considérant (…) que ce mode de rémunération, fixé unilatéralement par l’employeur, n’est pas prévu par la convention collective de la métallurgie ;

qu’il n’a pas fait l’objet d’un accord d’entreprise au sein de la société SKF FRANCE ;

que n’ayant pas été soumis à l’accord exprès et écrit de Pamphile WILSON, il n’a pas été intégré à son contrat de travail ;

Qu’en définitive, compte tenu du désaccord des parties, le montant de la rémunération due à Pamphile WILSON sera fixé judiciairement, le jugement étant réformé de ce chef ; »

Contrairement au TGI de Paris, elle reconnaît ainsi implicitement  le caractère insuffisant pour ne pas dire insignifiant du total des deux primes forfaitaires pour chaque invention versé à l’inventeur (que nous avions fustigé dans notre commentaire précité du jugement du TGI)  et que celui- ci équivaut à une absence de rémunération de ses inventions.  Donc la Cour hausse ces rémunérations, mais faiblement, certainement en raison de la faiblesse surprenante des chiffres d’affaires des inventions exploitées, déclarés par la défenderesse.

… Et de façon encore plus étonnante l’inventeur WILSON d’après l’arrêt n’a pas contesté le montant insignifiant de ces chiffres d’affaires déclarés, pour des durées d’exploitation atteignant 12 années…

Il est permis de penser que les pièces comptables d’exploitation établies et versées au débat par SKF n’ont sans doute pas été certifiées par un Commissaire aux comptes, comme l’avait pourtant expressément exigé l’inventeur P. WILSON…

 Toujours est-il que le total attribué par les juges du fond, pour 5 inventions, n’est que de …4 500 euros !...pour 3 inventions exploitées !

[Une somme de très loin inférieure aux honoraires  que doit acquitter un inventeur à un avocat spécialisé en PI; coût d’une instance soit devant le TGI soit devant la CA de Paris (chiffres fournis à titre purement indicatif)

sans participation de l’avocat aux résultats (non garantis, le procès peut être perdu) : 20 à 25 000 euros TTC).. ;

avec participation de l’avocat aux résultats (8 à 15%) + 12 000 à 18 000 euros]

Malgré le faible intérêt de ce litige au plan financier, deux aspects méritent des commentaires :

le mode de calcul de la rémunération d’invention établi unilatéralement par l’employeur

l’appréciation des modalités de la prescription

II- ) Un curieux mode de calcul de la rémunération  supplémentaire

<<…à compter du 1 er janvier 1997 puis du 1er avril 2008, un système

forfaitaire de rémunération des inventions de ses salariés ; que celui-ci prévoit deux

redevances versées à l’office des brevets, avec des coefficients notamment liés au nombre

d’inventeurs ; que c’est en vertu de ce système forfaitaire que les rémunérations

supplémentaires de Pamphile WILSON ont été calculées puis lui ont été versées. »

Etonnamment la Cour d’appel ne prend pas position sur le manque de réalisme du mode de calcul élaboré en 1997 par SKF pour fixer les rémunérations supplémentaires d’inventions de mission.Elle se contente de relever qu'il a été établi en-dehors des voies légales - obligatoires ce qu'elle n'observe pas - , n'avait pas été notifié à l'inventeur et que celui- ci le conteste, de sorte qu'elle décide de fixer les rémunérations en cause par voie judiciaire.

La Réglementation interne à SKF  était irrecevable en regard de la loi (L. 611-7 du CPI) et donc aurait dû être rejetée comme  inopposable au salarié WILSON

En effet l’article L. 611-7, 1° du CPI dispose que :

« Les conditions dans lesquelles le salarié, auteur d’une telle invention (de mission) bénéficie d’une rémunération supplémentaire sont déterminées par les conventions collectives, les accords d’entreprise et les contrats individuels de travail. »

Il est constant qu’en droit, l’emploi du présent "sont déterminées" vaut obligation impérative de déterminer lesdites rémunérations par des conventions collectives ou des accords d'entreprise ou des contrats individuels de travail., Faute de quoi le texte n'a aucune valeur juridique, donc n’est pas applicable et de ce fait inopposable aux salariés . Il en est ainsi par exemple lorsque l’article L. 611-7 CPI énonce « le salarié bénéficie d’une rémunération supplémentaire » d’invention (Loi du 26 novembre 1990) au lieu de « le salarié peut bénéficier d’une rémunération supplémentaire… » (loi du 13 juillet 1978).

Or la Réglementation interne de 1997 sur les inventions de la sté SKF a été élaborée unilatéralement, sans négociation avec les syndicats de salariés. Elle ne constitue donc pas un Accord d'entreprise au sens de L. 611-7 du CPI.De plus elle n’a pas été diffusée à l’ensemble du personnel salarié de l’entreprise dont l’inventeur WILSON,  mais conservée semi- confidentielle.

Contrairement à ce qu’ont estimé à tort le TGI de Paris en 1ère instance - et dans une moindre mesure la Cour d’appel de Paris dans son arrêt du 30 mai 2017,  qui est nuancée en admettant implicitement l'inédaquation et l'inopposabilité du Règlement de SKF, cette Réglementation interne est donc dépourvue de valeur juridique et bien inopposable à l’inventeur WILSON.

Subsidiairement et à titre surabondant, se référer à des critères purement administratifs tels que le paiement de la 7ème annuité de maintien en vigueur d’un brevet pour en déduire des conséquences relatives à la brevetabilité et au montant de la rémunération supplémentaire à payer à l’inventeur, n’a aucun rapport avec les critères habituels, tels que l’intérêt économique c'est-à-dire le Chiffre d’affaires de l’exploitation commerciale de l’invention. Un tel mode de calcul, complètement artificiel, est infecté d’un vice de nullité.

Les critères purement arbitraires  d’appréciation retenus par le Règlement interne SKF de 1997, sont déconnectés de la réalité au point de vue brevetabilité   (toute invention est reconnue brevetable jusqu’à preuve du contraire dès lors que le brevet a été délivré). et de l’intérêt économique de l’invention, non pris en considération par SKF.

III.-) La prescription de l'action en paiment de rémunération supplémentaire par l'inventeur salarié

Celle- ci n’avait pas été examinée en 1ère instance.

La loi applicable est celle du 17 juin 2008 (article 2224 du Code civil), qui prévoit une prescription quinquennale à partir de la date à laquelle le demandeur  a été informé des éléments le mettant en capacité de déterminer le montant de sa créance.

La Cour d’appel de Paris se prononce ainsi :

« « Considérant que la prescription quinquennale ne peut commencer à courir qu’à compter

du moment où la créance devient déterminable ;

Qu’en l’espèce Pamphile WILSON soutient que ce n’est qu’en cours de procédure de

première instance, par les conclusions de la société SKF FRANCE du 19 mars 2015, qu’il a appris le mode de calcul des primes qui lui ont été versées ;

Que la société SKF FRANCE soutient en sens inverse que Pamphile WILSON était

informé de ce mode de calcul dès lors que les règles en avaient été diffusées en interne, que

ses co-auteurs ont attesté en avoir eu connaissance, et qu’il en avait bénéficié pendant 15

ans ;

Mais considérant, en premier lieu, qu’aucune note interne fixant le mode de rémunération

ne mentionne Pamphile WILSON comme en ayant été destinataire ; en deuxième lieu, que

si un magazine SKF “réservé au personnel” comporte un article intitulé avis aux

inventeurs, celui-ci est daté du mois de janvier 1995, soit antérieurement au 1er janvier

1997, et ne comporte pas un mode de calcul basé sur le montant des redevances versées

à l’office, mais une somme fixe de 10 000 francs ou 20 000 francs, selon que l’invention

est individuelle ou collective ; en troisième lieu, que le fait que les co-inventeurs ont

attesté, dans des termes identiques, avoir eu connaissance des règles de rémunération pour

leur invention, n’implique pas qu’il en a été de même pour Pamphile WILSON ; que si

celui-ci a bien perçu des primes pendant 15 ans, cela n’implique pas qu’il connaissait avec

précision leur mode de calcul ;

Qu’en l’état des pièces produites, la cour estime que la prescription quinquennale n’a

commencé à courir que le 19 mars 2015, date à laquelle il est justifié que la société SKF

a porté à la connaissance de Pamphile WILSON le mode de calcul des primes qui lui ont

été versées ;

Que celle-ci n’est donc pas acquise, même pour partie ; »

Le salarié ne peut pas fournir une preuve négative : à savoir qu’il n’a pas été informé par ses employeurs du mode de calcul des primes de rémunération supplémentaire qui lui ont été versées.

La Sté SKF à laquelle incombe de fournir la preuve de ses affirmations, soutient au contraire, mais ne fournit aucune preuve à l’appui de ses dires, qu’elle avait dûment informé son salarié Pamphile WILSON du mode de calcul des primes d’invention en vertu du Règlement interne  unilatéral de 1997, en fait non communiqué à P. WILSON et qu’il n’avait donc pas pu approuver ou contester.

La Cour d’appel en déduit à juste raison que l’inventeur WILSON n’était pas en mesure avant le 19 mars 2015 de calculer les montants de ses primes d’inventions en application de ce Règlement unilatéralement établi par SKF donc qui n’a pas valeur d’Accord d’entreprise au sens de l’article L. 611- 7 CPI.

De sorte que la prescription quinquennale part du 19 mars 2015 et n’est pas écoulée.

Cette décision de la cour d’appel sur la prescription est tout à fait pertinente et suscite une entière approbation.

 Conclusion 

Le point le plus importantit itement pertinante de la cour d'appel sur la question de la prescription quinquennale et spécialement de son point de départ : la date à laquelle l'inventeur a eu connaissance (normalement par son employeur) des informations (mode de calcul, en complément des informations plus ou moins partielles dont il pouvait avoir eu connaissance sur l'étendue de l'exploitation de ses inventions)  lui permettant d'effectuer une estimation du montant de la rémunération supplémentaire à laquelle il pouvait prétendre (... en application d'un Règlement interne d'inventions non conforme à la loi (L. 611-7 CPI) donc sans valeur juridique...).

- En tout pour 5 inventions l’inventeur avait perçu de SKF 6 249, 61 €.

- Il a demandé pour 6 inventions un total de 17 577, 39 € supplémentaires

- Pour 5 inventions il obtient de la cour d’appel le montant royal de …4 500 €… soit 25% de ce qu'il demandait, une moyenne de 900 € supplémentaires par invention ...

On ignore le détail des éléments et calculs permettant de comprendre d'où provient l'écart béant (du simple au triple)  entre le montant total déterminé par l'employeur et celui obtenu par l'inventeur...

***Il est en tout cas plus que souhaitable que cet arrêt de la Cour d'appel de Paris fasse jurisprudence pour ce qui concerne la fixation du point de départ de la prescription quinquennale (éventuellement triennale en application de la loi du 14 juin 2013...) afin de mettre fin à l'anarchie actuelle à cet égard et donc à l'insécurité juridique qui en résulte.

L’explication de ces sommes dérisoires tient vraisemblablement aux chiffres d’affaires quasiment ridicules (et donc suspects) déclarés par l’ex- employeur pour 3 inventions et des durées d’exploitation sur 12 ans. Probablement non  certifiés par un Commissaire aux comptes, et qui malgré cela de façon étonnante n’ont pas été contestés par l’inventeur         

Dr Jean- Paul Martin

ancien ingénieur- conseil CPI

      ancien avocat au Barreau de Paris

 

Le 12 novembre 2017

Pour la commodité de la lecture, nous reproduisons en Annexe des présents commentaires notre Note d’observations sur le jugement de 1ère instance WILSON c/ SKF, publiée à l’adresse:

http://jeanpaulmartin.canalblog.com/archives/2016/12/18/34703733.html

 

ANNEXE

TGI de Paris 3ème chambre 4ème section, WILSON c/ Sté SKF France SA du 19 novembre 2015

Cette décision est intégralement publiée au 4/12/2016  à l’adresse :http://jeanpaulmartin.canalblog.com/archives/2016/12/04/34647993.html

Section A

Faits et procédure

La Sté SKF produit des roulements mécaniques notamment pour automobiles. . M. Pamphile M. WILSON, embauché comme Technicien par SKF est cité comme inventeur dans 5 brevets français déposés du 15 juillet 1997 au 23 décembre 2009.

M. WILSON affirme être aussi l’ l’auteur d’une 6ème invention, mais il existe un désaccord sur le point  savoir si celle- ci a donné lieu ou non à un dépôt de demande de brevet.

 M. WILSON a obtenu, par Ordonnance du Juge de mise en état avec Injonction à SKF de communiquer sous astreinte les pièces comptables qui lui sont nécessaires pour chiffrer ses revendications au vu des résultats de l’exploitation des différentes inventions.

L’inventeur revendique ainsi pour chaque invention, un pourcentage du profit net de chaque exercice comptable compris entre 2,5% et 5%, jusqu’en 2012 (page 5 du jugement).

En effet, il considère les primes d’invention qu’il a reçues de son employeur comme insuffisantes, car ne prenant pas en compte les résultats d’exploitation des inventions, c’est-à-dire l’intérêt économique des inventions.

Exemples :

Invention n° 1 : prime d’invention = 394, 24 euros + 382,37 euros de prime de dépôt de brevet.

Invention n2 : prime d’invention de 370 euros + prime de dépôt de 760 euros (Il n’est pas précisé si ces montants sont bruts ou nets de charges sociales).

Invention n°3 : prime d’invention de 507 euros et prime de dépôt de 760 euros

Etc…

SKF a indiqué que les inventions n° 2 et 3 ne font pas l’objet d’une exploitation commerciale.  Et que M. WILSON, qui n’a appris qu’à ce procès qu’une demande de brevet avait été déposée par SKF sur l’invention n°6 dont il affirme être co- auteur, n’apporte pas d’éléments de preuve établissant en quoi il serait co- auteur  de l’invention n°6.

L’inventeur demande à SKF de verser aux débats la comptabilité détaillée exercice par exercice de l’exploitation industrielle de ses inventions, et  au tribunal de fixer un pourcentage des profits nets de chaque exploitation, compris entre 2,5% et 5% du profit net réalisé.

La Sté SKF déclare que les inventions n°2 et 3 ne sont pas commercialement exploitées, et ne fournit donc pas de montants de profits pour celles- ci. Pour les autres inventions elle communique des chiffres d’affaires complètement dérisoires en dépit de longues périodes d’exploitation, au point que l’on peut douter de leur authenticité.

Néanmoins l‘inventeur ne met pas en doute la sincérité de ces déclarations, fournies par SKF sur Ordonnance d’Injonction de communiquer sous astreinte, renouvelée une fois pour défaut de fourniture des pièces dans le délai imparti par la première Injonction.

L’invention n° 6 n’est pas prise en compte car l’inventeur n’a pas fourni de preuves de sa contribution comme co- inventeur.

Section B

Prescription partielle.

L’employeur oppose une prescription quinquennale partielle pour les primes forfaitaires de certains brevets.

Le jugement ne précise pas de quelles dates part cette prescription.

 L’inventeur argue n’avoir jamais été informé de la mise en place de ces primes par SKF, il précise n’avoir jamais été informé de la vie des inventions et qu’il a dû attendre de saisir le juge de la mise en état pour en avoir connaissance. Il n’avait pas connaissance des règles internes que SKF  lui oppose, avant les conclusions du 19 mars 2015…

Effectivement, page 10 du jugement, le TGI indique :

«  La sté SKF indique avoir mis en place un système forfaitaire de rémunération des inventions des salariés, prévoyant un versement lié à la brevetabilité du brevet et un autre versement (…) pour les inventions présentant un intérêt stratégique pour lesquelles le brevet était maintenu en vigueur après 7 ans…. »

SKF ne mentionne pas avoir informé les salariés et donc M. WILSON de l’existence de ce système forfaitaire de rémunération et de sa teneur (modalités de calcul de la rémunération).

 Suit un exposé détaillé et relativement compliqué du mode de calcul de la rémunération supplémentaire, limitée exclusivement aux primes de dépôt et de brevet, défini à partir du 1er janvier 1997…

Un mode de calcul différent était précédemment en vigueur ; SKF n’a pas précisé avoir communiqué ce règlement aux salariés de l’entreprise ni même les avoir informés de son existence, ni donc rendu ce règlement accessible aux salariés.

C’est pourquoi en l’absence de ces informations l’inventeur estime - à juste titre selon nous - que l’ignorance organisée par SKF de ces éléments inconnus de lui  l’empêchait d’agir plus tôt devant le TGI et que ce mode de calcul est inopposable à ses demandes.

De ce fait aucune prescription n’a pu commencer à courir.

« Contra non valentem agere non currit praescriptio » »  et

« Actioni non natae non praescribitur ».

 

Section C

Applicabilité contestable des règles internes définies par SKF et inconnues de l’inventeur WILSON – Inopposabilité de ces règles à l’inventeur

Le TGI décide que les règles internes de SKF sur les inventions, bien que non communiquées à l’inventeur WILSON, sont néanmoins applicables, aux  motifs suivants :

 « Or, pour s’appliquer les règles définies n’ont pas nécessairement besoin d’avoir été approuvées par un accord d’entreprise, ni individuellement par le salarié concerné. Il n’est pas non plus nécessaire de justifier que les règles aient été portées  à la connaissance de M. WILSON, étant néanmoins observé que ce dernier les a vraisemblablement connues puisqu’il en a bénéficié depuis plus de 15 ans… »

En somme  si l’on suit le TGI, l’employeur n’a aucune obligation et quoiqu’il fasse, ce serait légal ! Cette position du Tribunal ne peut qu’être catégoriquement désapprouvée. Les juges du fond se contentent d’affirmations gratuites, non étayées, ne reposant sur aucun élément objectif tangible ce qui leur ôte tout crédit. 

Ses deux premières lignes sont contraires à la loi. En effet l’article L. 611-7 1° du CPI dispose :

« Les conditions dans lesquelles le salarié, auteur d’une telle invention, bénéficie d’une rémunération supplémentaire, sont déterminées par les conventions collectives, les accords d’entreprise, et les contrats individuels de travail. »

Il est constant qu’en droit, le présent a valeur d’obligation. Par conséquent l’expression « sont déterminées… » se comprend comme « doivent être déterminées… ». Ainsi contrairement a ce qu’affirme à tort le tribunal de Paris, si la convention collective ne définit pas de modalités de paiement et de calcul de la dite rémunération, ce qui en l’espèce est le cas de la CC de la Métallurgie, l’entreprise a l’obligation légale de les définir, soit dans un Accord d’entreprise, soit dans les contrats individuels de travail.

Si comme SKF elle ne le fait pas et préfère se contente d’établir des règles internes confidentielles de calcul hors de tout accord d’entreprise, celles- ci n’ont aucune valeur juridique et sont inopposables au salarié inventeur puisqu’elles ne sont pas établies dans le cadre fixé par la loi.

Cette conclusion d’inopposabilité est renforcée par le fait qu’elles ont de plus été dissimulées par SKF aux inventeurs- sinon la Sté SKF n’aurait pas manqué de le faire savoir et de le justifier.

Il est donc tout à fait scandaleux et révélateur d’un parti- pris choquant du Tribunal en faveur de la Sté SKF, car contraire au devoir de neutralité des magistrats, que ces derniers, alors qu’ils dispensent allègrement SKF de toute obligation même de celle, légale, de définir les règles de calcul dans le cadre d’un accord d’entreprise,  osent prétendre que l’inventeur « a vraisemblablement connu les règles (de SKF) puisqu’il en a bénéficié depuis plus de 15 ans. » 

 Mais ce n’est pas parce que l’inventeur « en a bénéficié depuis plus de 15 ans » qu’il avait nécessairement été informé de ces règles internes établies unilatéralement et confidentiellement par l’employeur !

Il n’est pas acceptable qu’un Tribunal de grande instance accuse sans le moindre élément de preuve ni aucun fondement un inventeur d’être « vraisemblablement » un menteur tout en affichant la plus grande indulgence pour le comportement de l’ex- employeur. Cela s’appelle du parti- pris, interdit à des magistrats, qui infecte leur jugement d’un vice rédhibitoire.

Comment le seul fait de porter sur des bulletins de salaire uniquement des montants de primes de brevets comme « 394 € « , « 1260 € », « 507€ »… aurait-il  pu permettre à l’inventeur d’en avoir connaissance ?.... sans aucune explication sur une Note annexée sur la façon dont elles ont été déterminées, donc leurs règles de calcul : voir page 9 le texte du jugement ; les formules de calcul sont basées sur les 3ème et 7ème annuités du brevet assorties de coefficients multiplicateurs et le résultat divisé par le nombre de co- inventeurs. D’où des montants plus que modestes, dérisoires, dont semble-t-il il faut encore retrancher charges sociales et impôt sur le revenu…

 

 On relève ici un parti- pris manifeste, scandaleux, « deux poids deux mesures »  des juges du fond en faveur de l’ex- employeur exempté en violation de la loi – article L. 611-7 CPI - de toute contrainte légale ou obligation par le Tribunal. Alors que les déclarations de l’inventeur, implicitement confirmées par l’ex- employeur SKF qui n’a pas déclaré avoir communiqué les règles internes en cause à l’inventeur et encore moins en avoir justifié,  sont ouvertement et avec une légèreté blâmable considérées de façon injurieuse pour l’inventeur WILSON comme mensongères  par ce Tribunal, sans preuve aucune !

 

Section D

Modalités de la rémunération et mode de calcul contraires aux critères jurisprudentiels et de la convention collective

Page 9 du jugement, le TGI de Paris affirme :

« … Contrairement à ses affirmations [de l’inventeur WILSON] les modalités de rémunération de la sté SKF ne sont pas contraires aux critères jurisprudentiels qui énoncent qu’il doit être tenu compte pour les modalités de la rémunération supplémentaire due à un salarié pour une invention de mission du cadre général de la recherche, de l’intérêt économique de l’invention, de la contribution personnelle de l’inventeur et des difficultés de mise au point. »

 

A la page 10 les juges du fond précisent leur pensée :

« Le fait de prévoir le versement d’une prime lors de la 7ème année de maintien du brevet intègre suffisamment le critère posé par la jurisprudence de « l’intérêt économique de l’invention. » Rien n’impose que le montant de la prime soit fonction des résultats financiers tirés de la commercialisation du brevet. »

« Les autres critères dégagés par la jurisprudence, le cadre général de la recherche, la contribution personnelle de l’inventeur, les difficultés de mise au point sont également suffisamment pris en compte par la sté SKF dans la détermination des modalités d’octroi de la rémunération supplémentaire. »

 On croit rêver à la lecture de ces 3 derniers paragraphes au vu de leur caractère fantaisiste, surréaliste et  hors de toute réalité !

En effet :

a) Le Tribunal confond « intérêt économique d’une invention » et « versement d’une prime lors de la 7ème année de maintien d’un brevet » ce qui n’a rien à voir avec « l’intérêt économique » ! Une prime délivrée la 7ème année du brevet n’a aucun rapport avec le « critère de l’intérêt économique » ! … On reste consterné devant une confusion de cette nature... La doctrine et la jurisprudence sont pourtant très  claires sur ce point.

L’intérêt économique (CA HT, marges nettes ou semi- nettes…) constitue même la base de la partie essentielle de la rémunération supplémentaire de l’inventeur !

 

Les juges du fond de la formation auteur de ce jugement, complètement  novices en propriété industrielle, ne maîtrisent pas le sujet.. Ils ignorent qu’en droit des brevets, « intérêt économique d’une invention » est synonyme de « de « intérêt commercial », « intérêt pécuniaire » ; ce qui signifie « marges bénéficiaires », chiffre d’affaires d’exploitation industrielle/commerciale « ou « résultats nets d’exploitation » … !

 

b) De même les autres  critères de calcul de SKF, développés dans le texte du jugement, sont totalement abstraits, sans aucun rapport avec « le cadre général de la recherche », « la contribution personnelle de l’inventeur », « les difficultés pratiques de réalisation de l’invention »…

 Il est incroyable que le TGI de Paris, qui jouit d’une compétence exclusive pour les litiges sur brevets d’invention, puisse commettre de telles erreurs.

Il est donc absurde et mensonger de prétendre que ce mode de calcul satisferait à l’exigence des 4 critères jurisprudentiels rappelés par le jugement (et qui sont mentionnés dans la CC nationale des Industries chimiques de 1985)..

Du reste, le Tribunal ne s’est même pas rendu compte qu’il s’auto- contredit lui- même :

  • d’une part en affirmant – à tort - que « rien n’impose qu’une rémunération supplémentaire d’invention tienne compte des résultats financiers d’exploitation de cette invention « (voir aussi plus loin sur ce point et l’auto- contradiction du Tribunal qui en résulte)
  • et d’autre part en indiquant de façon surréaliste que les seules primes (brutes..) ridicules de dépôt et de brevet versées à l’inventeur WILSON « tiennent compte des « 4 critères jurisprudentiels de fixation du montant d’une rémunération supplémentaire d’invention » !! Donc notamment  de « l’intérêt économique » c’est-à-dire  des résultats financiers d’exploitation commerciale de l’invention » !!

Ce qui rend le jugement complètement incohérent !

 

Un tel manque de compétence en droit des brevets d’invention d’une formation de juges du fond au Tribunal  de grande instance de Paris alors que celui- ci  détient un monopole légal de compétence exclusive pour cette catégorie de litiges est particulièrement scandaleux.

 

Il est dommageable aux inventeurs salariés, puisqu’il conduit à des décisions totalement fausses qui entretiennent l’insécurité juridique ; en appel elles doivent être invalidées et obligent les inventeurs à supporter les frais supplémentaires élevés et indus d’une procédure d’appel (20 000 à 30 000 Euros)

Ainsi, en 2016 les frais cumulés de procès en 1ère instance et en appel que doit supporter un inventeur – sur son argent personnel alors que l’ex- employeur utilise les ressources illimitées de la trésorerie de son entreprise, qui passent ensuite dans ses frais généraux déductibles fiscalement…-- atteignent  50 000 à 60 000 Euros…

 

Ces frais d’appel considérables – ou de recours en cassation contre un arrêt d’appel infecté d’erreurs substantielles sur le fond ayant motivé le pourvoi - devraient être remboursés à l’inventeur lorsqu’il est admis que le jugement de 1ère instance défavorable à l’inventeur comportait des erreurs grossières de droit ou d’analyse des faits ou d’absence de motifs du rejet etc…pour cela il faut préalablement que les inventeurs versent aux débats copie des factures de leurs avocats…

 

Section E

Incompétence ou parti- pris systématique des juridictions de Paris contre les inventeurs, effets de pressions de lobbies   sur la Justice

Le Tribunal fait état de « critères jurisprudentiels » et de « la jurisprudence » en la matière… dont ses appréciations fausses démontrent qu’en réalité il ne les a pas étudiés !  Le summum de l’incompétence  est atteint avec la phrase finale, exacte antinomie de la réalité jurisprudentielle :

« Rien n’impose que le montant de la prime soit fonction des résultats financiers tirés de la commercialisation du brevet »  (!!!)

Cette phrase totalement surréaliste laisse pantois, les bras en tombent.  De qui se moquent les juges du fond du TGI de Paris, 3ème chambre 4ème section  ?

Soit ils sont complètement incompétents et ils doivent laisser leur place à des juges qualifiés, ayant une vision exacte des réalités,  et non déformée par le prisme de leur partialité anti- inventeurs..

 

Soit ils ne sont pas incompétents, mais animés de mauvaise foi et d’un incompréhensible parti- pris anti- inventeurs, venins insidieux et à terme mortels pour les entreprises infectées par ces poisons générateurs chez les inventeurs d’entreprises de démotivation et d’un profond dégoût de la Justice.

 

Section E

Conclusion

 

Les juges coupables de ces  débordements devraient être sanctionnés et des mesures efficaces prises par le Gouvernement  pour empêcher les lobbies anti- inventeurs de faire pression sur les juges du fond (TGI et CA de Paris)  afin qu’ils cessent de  trancher ces litiges systématiquement en faveur des employeurs par des « arguments » fantaisistes, dénis de justice (au sens large) et de toute réalité.

Alors que dans ces litiges les inventeurs sont toujours les victimes des abus de pouvoir et agissements patronaux en violation des lois et des conventions collectives, et non l’inverse, et que la Justice, alliée à  ces mauvais employeurs, s’ingénie à leur refuser la satisfaction de leurs droits légitimes.

 

Il est scandaleux que ces inventeurs, fers de lance de l’Innovation qui rendent tant de services souvent inestimables aux entreprises et à la collectivité nationale,  doivent affronter dans leurs démarches une alliance immorale, contre nature entre les syndicats patronaux et une  Justice dévoyée, discréditée par une connivence  honteuse avec lesdits syndicats,  le plus souvent en faveur de grandes entreprises..

On observe hélas depuis un dizaine d’années et spécialement depuis 2010 de plus en plus de jugements partiaux  en faveur de la partie la plus puissante, l’ex- employeur, selon le vieil adage qui n’a rien perdu depuis 3,5 siècles de son actualité :

 

« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir »…Ce qui montre bien leur peu de sincérité, et donc d'honnêteté, leur complicité avec les puissants qu'ils aient tort ou raison....

La répétition de décisions aussi injustes, partiales et dommageables aux inventeurs que la décision WILSON décourage ceux- ci au lieu de les encourager.

Au sein de la mondialisation une entreprise sans inventeurs donc sans innovations est à bref délai condamnée à mort.

Est-ce ce que veut dans sa Tour d’ivoire la Justice par des jugements aussi absurdes, aberrants, qui la discréditent ?

En définitive dans l’affaire WILSON le TGI de Paris rejette toutes les demandes de l’inventeur (sans avoir besoin de se prononcer sur la prescription partielle), car il estime que les primes déjà versées à l’inventeur WILSON satisfont à tous les critères jurisprudentiels de détermination de la rémunération supplémentaire d’invention ... Ni plus ni moins !

Au vu de l’analyse ci-dessus, le demandeur est, selon l’auteur de ces lignes fondé si ce n’est déjà fait, à interjeter appel de ce jugement calamiteux, dans les 2 années à partir de la date du jugement (19 novembre 2015), en invoquant des voies de recours fondées sur ses graves déficiences.

 

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